Retrouvaille d'après guerre [PV ELISAN]

J’avais fini par retourner dans la salle commune. Après m’être assuré que je n’étais pas tombée dans les pommes pour rien, il fallait que je retrouve celui vers qui toutes mes pensées étaient à présent tournées. J’étais retournée dans la salle commune mais même si maintenant il y avait déjà plus de monde, je ne retrouvais pas le blanc distinctif que je cherchais pendant un bon moment. Je commençais sérieusement à m’inquiéter. J’avais pris des informations auprès d’Arianna mais il était plus que possible qu’il est eu des changements entre temps ! Et si je ne le retrouvais pas… Je ne sais comment je pourrais m’en remettre… Ce serait trop pour que je le puisse supporter… Je sentais mon cœur battre des records de vitesse, ma gorge se nouer par l’émotion, les tremblements s’emparer de mes mains… jusqu’à la délivrance.

« E-elisan... »

Je crois bien que mon cœur loupa un battement avant de repartir de plus belle. Je me retournais à ce ton caractéristique, à cette façon particulière de prononcer les syllabes de mon prénom. Je sentis les larmes monter aux yeux quand je le vis. Ses cheveux neige, son doux visage, ses yeux or, j’étais tellement heureuse ! On fonça tous les deux dans les bras de l’un et de l’autre. Je ne voulais plus le lâcher ! Il me frotta le dos comme pour me rassurer, effacer mes inquiétude. Quand il se sépara de moi, je voulus retourner de suite au creux de ses bras. Heureusement il garda une de mes mains dans la sienne, c’était comme mon point d’ancrage qui m’empêchait de chavirer vers les larmes tant j’étais émue. Mes yeux s’accrochèrent aux siens, j’y voyais une fragilité qu’il m’avait toujours cachée et j’en fus encore plus touchée, encore plus chamboulée. J’avais l’impression de compter pour lui tout autant qu’il comptait pour moi. Je ne voulais plus le perdre.


« J-je suis heureux... »

Je ne le quittais pas des yeux, impressionnée qu'il puisse mettre des mots sur ce que je ressentais aussi et j'en étais encore plus comblée de joie. Il baissa la tête, les yeux clos en étreignant ma main. Je craquais vraiment. Mon cœur se gonflait d’amour et je me rapprochais de lui sans le lâcher. Ma main libre se posa sur sa joue et je lui déposais un léger baiser sur ses lèvres n’osant pas plus tant je me sentais tremblante encore. Ma main glissa ensuite sur son torse ou je posais mon front, inspirant fort contre lui. Je tentais de calmer la peur qui m'avait agitée juste un instant avant pour me concentrer sur le bonheur que je ressentais de le voir sain et sauf.

« J’ai eu si peur… Dis-moi qu’il ne t’est rien arrivé… »

Je me doutais qu’on l’ait soigné avant que je le vois, mais rien que savoir que de son côté il avait dû être confronté à ses soldats, je sentais l’effroi me gagnait à nouveau. Je n'avais aucun moyen de savoir ce qu'il s'était passé pour lui et j'appréhendais tellement de le connaître. Cette expérience laissera des traces, c’était sûr… Mais au moins il était là avec moi.

« Moi aussi j'ai eu très peur mon ange... »

Mon cœur bondissait dans ma poitrine anxieusement. Il n’avait pas répondu clairement à ma question et j’étais à peu près certaine qu’il ne dirait rien pour m’inquiéter. Alors c’était plus fort que moi, plusieurs scénarios catastrophiques passait dans ma tête et me rappelaient que je n’avais pas été à ses côtés… Mais pourquoi ? Je m’en voulais vraiment de n’avoir pas été à ses côtés à ces moments…

« Et... non je n'ai trop rien eu, juste quelques bleus à cause de coup enfin... un peu comme tout le monde a eu quoi... »

Je levais les yeux vers lui et bien que je sente ses bras autour de moi, ses yeux étaient ailleurs. Il évitait les miens et je sus qu’il ne me disait pas tout. Je baissais les yeux et me contentais de poser ma joue sur son torse me laissant bercer comme si de rien n’était. Il ne voulait pas m’inquiéter, rien de plus. Et je pouvais comprendre cette attention.

« E-et toi ? Dis-moi qu’ils ne t’ont rien fait...? »

Je posais mon menton contre lui pour plonger mon regard dans le sien. Quand les souvenirs de cette épreuve défilaient dans ma tête, je me rendais compte que j’avais vraiment eu beaucoup de chance. Tellement par rapport à d’autres… Mes yeux s’embuèrent légèrement, des images s’étaient gravées en moi et je ne pensais pas pouvoir m’en défaire… La mort d’Erin, les enlèvements de Maester et Ren’, les coups et blessures que j’avais infligé... J’étais là en sécurité dans les bras de celui qui comptait le plus pour moi mais j’avais encore mal, encore peur.

Ses lèvres se posèrent sur les miennes, possessives et protectrices. Je m’abandonnais à ce baiser, essayant de repousser la profonde tristesse qui voulait m’envahir. Je baissais ensuite la tête pour qu’il ne voie pas les larmes qui s’étaient agglutinées au coin de mes yeux.

« J’ai eu plus de peur que de mal… J’ai eu beaucoup de chance… par rapport à d’autres… »

Je me reculais légèrement en gardant ses mains dans les miennes et relevais la tête en espérant qu’il n’y avait plus de traces de ma peine. Je tirais légèrement en me dirigeant vers le couloir.

« J’aimerais bien qu’on… qu’on s’isole… Tu veux bien ? J’aimerais… pouvoir tout te dire… mais là j’y arrive pas… »

Je le regardais dans le fond des yeux pour qu’il comprenne que je voulais qu’on se retrouve juste tous les deux, que je voulais me blottir contre lui et vider ma peine, que je voulais juste être avec lui.

Ma main dans la sienne je sentis la pression réconfortante avant qu’il tente de me rassurer par ses mots.

« Tu sais... dans ce genre de situation on est tous des victimes, il ne faut pas se blâmer car on ne pouvait rien faire... Je ne veux pas que tu te torture l'esprit... »

Mais je ne pouvais pas m’en empêcher... Je me sentais trop coupable... Moi j’étais là avec lui en sécurité alors que d’autres étaient dans les mains de ses êtres humains devenus des machines à tuer... Je frissonnais d’horreur rien que d’y penser...

Il finit par se laisser conduire dans un autre couloir avec un magnifique sourire aux lèvres. Je le laissais ensuite nous guider, ma main toujours dans la sienne, entrelacées, me permettant de garder mon épaule collée à la sienne. On arriva alors à la fin d’un couloir dans un espace un peu plus grand qui représentait plus une salle d’attente qu’autre chose. Il n’y avait qu’une porte dans un coin qui n’était pas vraiment accueillante tant il semblait qu’on ne l’ai pas touché depuis des siècles. Mon regard dériva de cette dernière quand Yahi se pencha vers moi, nous rapprochant encore plus.

« Tu dis que tu n’arrivais pas à tout me dire y'a 5 minutes, ne te force pas si tu ne peux pas... J-je ne veux pas que tu te sentes mal mais, si pour te sentir bien tu as besoin d'évacuer tout ce qui t'est arrivée alors je veux t'être utile, je ne te laisserais plus seule maintenant... »

Son regard alla d’abord au sol, puis il inspira comme pour se donner de la force et ses yeux trouvèrent les miens. Je le regardais un instant sans pouvoir rien dire. Ce qu’il venait de dire m’avait vraiment touché ! Je n’en éprouvais qu’un plus grand besoin d’être contre lui. Je le poussais doucement pour qu’il s’asseye sur le petit canapé collé à un mur. J’attendis qu’il soit installé pour me poser sur ses genoux et me tourner de sorte que ma tête trouve sa place au creux de son épaule. Mes jambes recroquevillées contre moi je les posais contre son torse et me pelotonnais complètement contre lui. Je fermais les yeux et soupirais plusieurs fois pour refouler le flot d’émotions qui tentaient de me faire craquer.

« Je... j’ai vu des trucs... Je ne peux pas empêcher des images de tourner dans ma tête... J’étais là, près du banquet et...et ils ont débarqué... Erin était là à côté de moi... Elle voulait agir... Elle voulait nous sauver... Mais elle l’a payé... Ils lui ont tiré dessus ôté de moi... Elle voulait agir... Elle voulait nous sauver... Mais elle l’a payé... Ils lui ont tiré dessus Yahi ! Elle... elle... est morte sous mes yeux... Juste parce qu’elle avait été la plus courageuse... »

Je cachais mon visage dans son cou, laissant couler les larmes sans plus pouvoir m’en empêcher. Je l’avais trop retenu en moi pour arrêter.

« Et les enlèvements... où même en essayant j’ai rien pu faire... Je les aidais... Je les aidais et ils me sont tombés dessus, je n’ai rien pu faire pour les récupérer... »

Je n’osais imaginer dans quelle état j’étais mais je me redressais quand même pour essuyer mes joues trop, beaucoup trop mouillées.
« J’ai rien pu faire pour Erin mais peut-être qu’on peut faire encore quelque chose pour les élèves qui ont été pris... »

Les yeux dans les yeux, les miens commençaient à sécher par la détermination qui s’installait doucement en moi alors que les siens s’assombrissaient avec une lueur qui ne plaisait pas vraiment. Même s’il prit un mouchoir pour essuyer mes joues où les larmes y avaient laissé des traces je compris que ce qu’il allait dire n’allait pas enlever cette désagréable impression.

« Je comprends mon ange... mais, ce n'est pas ta faute. Ne te torture pas plus s'il te plait, personne ne peut en vouloir. Nous tous pour la plupart avons été inutile face à ce danger bien trop grand pour nous autre adolescent. »

Il avait beau me dire ça, je sentais toujours ce poids sur ma poitrine et ce malaise permanent depuis l’événement. Je savais que je n’avais pas à me sentir responsable pourtant ma tête n’arrêtait pas de tourner divers scénario différents où j’aurais dû agir différemment. Des « si » qui pesaient sur ma liberté d’esprit et qui m’empêchaient de voir la vérité en face. Je ne voulais plus me sentir coupable…

« Je ne veux plus te voir vers un danger si grand... Si l'on doit partir délivrer les autres, j'irais et je ferais ce que tu voudrais faire une fois là-bas mais, je ne veux en aucun cas que tu t'expose au danger... Tu as déjà trop souffert et je te l'ai déjà dis, je serais ton bouclier qui te protégeras de toute la souffrance qui te vise. »

Je sentis un pincement au cœur qui me figea instantanément. Je ne pouvais pas lui en vouloir de penser de cette façon mais… mais… ce n’était tellement pas moi… Je ne voulais plus être gardée éloignée de tout… Je ne voulais pas être celle que l’on considérait comme trop fragile pour agir… Pourtant c’est ce que ses bras me faisaient ressentir à ce moment précis… Et mes yeux s’embuèrent à nouveau… Je me redressais et le regardais lui montrant que ses paroles ne m’avaient pas apaisée. Je pris son visage entre mes deux mains tout en le regardant encore dans le fond des yeux.

« Nan… Je ne veux pas… Je l’ai trop vécu pour rester écarter comme ça… Je ne veux certes pas t’inquiéter mais il me serait encore plus dur de rester là sans rien faire ! Je ne suis pas comme ça et je ne peux pas rester ici à l’abri alors que d’autres sont en danger… »

Mes larmes avaient repris et cette fois-ci pour une autre raison. Je ne voulais pas lui faire de la peine mais ce qu’il me demandait était trop dur ! Ce n’était pas possible ! Et j’espérais qu’il pourrait comprendre… Je l’espérais vraiment… Je posais mon front contre le sien en fermant les yeux. Si seulement il avait réagi autrement…

« Je suis désolée… Mais je ne peux pas… Il faut que je fasse quelque chose… Sinon je ne serais jamais tranquille… et je ne veux plus vivre dans le regret. »

Je lui posais un léger baiser avant de me relever, de laisser mes mains glisser sur ses joues et de reculer.

« Je te promets que je ne me mettrais pas en danger inutilement… et que... si tu ne m’en veux pas, je reviendrais. »

Je fis quelques pas en arrière avant de me retourner m’en voulant déjà pour ce que je faisais. Mais j’avais décidé de ne plus vivre dans la peur et pour cela il fallait que j’affronte ce qui persistait à m’y terrer… J’allais pas laisser des Tsukiens subir ce que j’avais subi…