This could be Heaven or this could be Hell [PV - Lacerta]

Lacerta se sentait étrange.. Cela faisait un moment qu’il n’avait plus vu Hideki. Celui-ci l’avait précipitamment quitté après leur maladroite rencontre. Et quelle rencontre ! Hideki l’avait retrouvé presque mort de froid, il avait dû utiliser ce qu’il lui restait d’énergie pour rentrer de force dans l’enceinte de l’école. Ensuite Hideki s’était occupé de lui.. Il y pensait souvent. Il aurait bien voulu le connaître plus. Mais maintenant qu’Hideki était parti, Lacerta ressentait comme un vide au fond de lui. Comme s’il lui manquait quelque chose. Comme s’il devait finir ce qu’il avait commencé.

C’était une journée froide et légèrement enneigée. Lacerta, pris de nostalgie, déambula avec sa guitare dans les couloirs de l’académie.  Il chercha après un endroit calme mais il ne cessait de revenir au même point. Le hall d’entrée. Cet endroit, celui de ses premiers contacts avec Hideki.. Ses premiers contacts physiques et réciproques. Même si ce n’était pas une rencontre normale, c’était une des meilleures de sa courte existence. Il n’avait pas eu à se méfier, ni à apprendre à faire confiance. Il s’était juste abandonné car son instinct lui avait murmuré que cette personne ne lui ferait pas de mal, qu’elle n’était pas là pour lui faire vivre un enfer. Il avait cru cette petite voix et heureusement, elle ne s’était pas trompée.

Il se décida à s’installer dans un couloir adjacent. Il ne voulait pas être perturbé par le va-et-vient présent dans cette salle. Il devait donc décider d’une musique à interpréter.. Il voulait jouer mais son cœur n’y était pas. Il n’arrivait pas à gratter sa fidèle guitare. Il voulait s’excuser auprès d’elle mais ses doigts commencèrent à gratter sans qu’il ne puisse reconnaître ce qu’il jouait. Après un moment à suivre son instinct, Lacerta reconnu la musique. C’était une musique qu’il avait entendue lorsqu’il faisait la manche, proche d’un restaurant chinois. Pourquoi joue-t-il cette chanson ? Il n’en savait rien. Bien que ce ne soit qu’une chanson de restaurant, celle-ci était profonde et la guitare arrivait à trouver les notes justes pour toucher. Bientôt des élèves s’amoncelèrent autour de Lacerta pour l’écouter jouer. Celui-ci ne les remarqua que lorsqu’il s’arrêta. Ils l’applaudirent. Certains étaient en larmes et d’autres semblaient perdus, loin dans leurs songes, la tête sur le côté. La musique terminée, les applaudissements taris, les élèves repartirent en laissant Lacerta seul.

Après un moment à réfléchir, Lacerta se mis en quête d’un endroit bien plus calme. Il ne voulait plus être épié. Il chercha mais ne trouva rien. La seule solution était de mettre un pull et de trouver une place tranquille dans le parc. Là, avec ce temps, personne ne pourrait venir l’embêter. Mais sur le chemin, Lacerta s’arrêta. Il ne voulait pas s’éloigner de l’endroit de leur rencontre. Il était tellement mal de s’en éloigner.. Il décida finalement de faire un détour par le portail. Ce fameux portail. Celui qui avait perdu son précieux protecteur, le cadenas, car il entravait la route vers la sécurité. Il déambula donc jusqu’au portail et s’y recueilli. Quelle ne fut pas sa stupéfaction lorsqu’une personne s’en approcha.

Cette tâche semblait familière à Lacerta, mais il ne savait plus où il l’avait rencontrée. Ce n’est que lorsqu’il remarqua la silhouette d’une canne qu’il comprit. Il était revenu. Hideki. Non.. Ça ne pouvait pas être possible, ce n’est qu’un mirage. Pourquoi reviendrait-il ? Lacerta ne bougea pas d’un millimètre, il se surprit même à essayer de diminuer le bruit de sa respiration. La personne s’avança bien que difficilement vers le portail. Elle chopa à plusieurs reprises. Arrivée au portail, elle semblait chercher un objet. Sûrement la carte pour ouvrir le portail. Depuis la venue de Lacerta, la serrure avait été refaite. Elle résistait à certains pouvoirs. On la disait invincible. La personne semblait perdue. Elle n’avait pas sa carte, sinon elle serait rentrée directement. Cette personne.. Si elle n’avait pas été aveugle, aurait dû voir Lacerta. Or elle ne l’avait pas apostrophé pour l’aider. C’était bien Hideki. Il s’était déjà assis sur ce même sol où Lacerta avait attendu pendant ce qu’il lui semblait une éternité. Il commençait à pleurer. Lacerta se devait de l’aider. Mais il ne voulait pas partir comme un voleur pour appeler un surveillant..

« Salut toi, ça fait un bail. » ‘’Rire nerveux’’ « Nos rôles sont inversés maintenant. J’espère juste que tu ne vas pas t’évanouir. »

Lacerta attendait sa réponse avec impatiente.

« Salut toi, ça fait un bail. » Il riait. « Nos rôles sont inversés maintenant. J’espère juste que tu ne vas pas t’évanouir. »

Une voix profonde et lointaine réussit à percer les contours opaques et sourds de mon cerveau, annihilé par le froid, l’amertume et la fatigue. Mon petit corps tout entier, pâle et frissonnant, était soumis à ces légères bourrasques de vent, irrégulières mais perçantes. Je sentais le bout de mes doigts m’abandonner, alors que mes pieds se tordaient vainement dans l’espoir de reprendre un peu de chaleur et de ne pas finir raides. Je relevais la tête et du revers de mon poignet, j’essuyais les larmes de mes joues. Ah… cet homme m’avait vu pleurer, dans une si piètre position… mais je ne comprenais pas ce qu’il essayait de me dire… Je n’eus même pas la force, ni le courage de me relever.

« Je te connais pas... »

Je reniflais, et resserrais un peu plus mes genoux contre moi, avec cette furieuse intuition que ça me réchaufferait, mais chaque mouvement faisait monter en moi un sentiment de douleur effroyable… j’allais finir mort, si personne ne m’aidait ! Et l’autre idiot qui rigole derrière ! Ah, je suis sûr qu’il m’abandonnera là et que demain, tout fier, il racontera à tout le monde qu’il a vu un gosse fragile pleurer devant le portail parce que, par malheur, il avait perdu son pass ! Je lui foutrais des claques, moi… je me vengerais, moi. Je pouvais bien le frapper, de là où j’étais mais… je n’avais pas l’ambition de dire que je pourrais résister à ce choc : si je m’infligeais une claque, même en utilisant mon pouvoir, je souffrirais trop pour une satisfaction moindre… J’ai si froid… mes joues me tirent…

Je ne comprenais pas ce que ce garçon voulait : outre le fait qu’il a ri à mon nez, il… il insinuait que nous nous étions déjà rencontrés… je me mettais un peu à creuser la mémoire, en tentant vainement de parcourir ma bibliothèque mentale de voix, à la recherche de la sienne. Quelque chose… de chaleureux, au fond de son ton. Quelque chose de presque… doux ? Mais il avait ri de moi ! Je ne pouvais pas lui faire confiance… ça me rappelait trop cet aveugle que j’avais aidé… une minute ! Les sens en éveil, je m’enquerrais d’une voix rauque et impatiente.

« Lacerta, c’est toi !? »

Ce retournement de situation me fit pâlir. Lui… lui, qui m’avait tant bouleversé ce soir là ! Lui qui avait complètement retourné mon esprit, ma façon de penser, et mes sentiments ! Le soir où nous nous étions rencontrés, ce fut tout un enchainement de péripéties plus étranges les unes que les autres… il m’avait beaucoup intrigué, déjà car c’était le premier aveugle comme moi que je croisais depuis mon arrivée, mais aussi parce qu’il dégageait un puissant charme que je ne saurais expliquer… il avait cette aura rassurante et incroyablement forte de mon grand frère, son allure, sa voix… J’avais été si troublé ! J’avais voulu rester avec lui… ô, combien de fois ais-je pu penser à lui ces derniers mois ! Il était l’une des personnes, l’un des souvenirs qui m’avaient poussé ici. Si intriguant… et je crois bien que c’était réciproque, d’ailleurs. Non, il fallait que… que je prenne du recul sur tout ça… Je me redressais doucement sur mes jambes, sans pouvoir m’arrêter de trembler et je l’apostrophais d’une voix hautaine et supérieure, de façon à tenter de lui faire comprendre qu’entre lui et moi, il y a une grande différence.

« Ouvre-moi immédiatement le portail, ou sinon, tu vas vraiment le regretter ! »

Je ne savais vraiment pas à quel jeu je jouais, mais tout semblait si… nouveau. C’était la première fois que je ressentais ce genre d’émotions, qu’une personne me mettait dans de tels états… je ne savais comment réagir, et je me disais qu’imposer cette distance, et que garder ce masque froid et opaque étaient les meilleures choses à faire. Mais la tentation était si forte… je voulais qu’il… qu’il me remarque.

« Je ne te connais pas. »

Ces mots eurent l’effet d’un million de dagues qui pénétraient le cœur de Lacerta. Comment Hideki, qui avait peut-être vécu peu de choses mais des choses intenses avec Lacerta, pouvait l’avoir oublié comme ça ? Peut-être ne l’avait-il juste pas reconnu ? Décontenancé, Lacerta se rapprocha doucement de la grille. Il voulait être le plus proche possible d’Hideki, lui faire comprendre qui il était.

Hideki reniflait et se renfermait encore plus sur lui-même. Lacerta eu un choc. Le corps d’Hideki devenait de plus en plus froid, il était en hypothermie. Comme il l’avait été quelques temps plus tôt. Sauf qu’il pouvait encore utiliser ses pouvoirs pour forcer la serrure. Cette fois-ci, il ne pouvait plus le faire et il n’a pas de carte magnétique sur lui. Il devait trouver un surveillant et rapidement. Mais il ne pouvait pas laisser Hideki tout seul dans le froid alors qu’il risquait d’y rester.

« Lacerta, c’est toi !? »  

Hideki venait de comprendre, il se releva. Il semblait vraiment en piteux état, se cramponnant pour se relever. Il se redressa complètement, comme s’il voulait se grandir. Lacerta ne comprenait pas pourquoi il faisait un cinéma pareil. Il pensait qu’il allait se rapprocher de la grille. Il était proche mais Lacerta sentait qu’il était loin, très loin de lui. Et le ton qu’Hideki employa dans cette phrase qui, encore une fois, enfonçait une myriade de couteaux dans son corps :

« Ouvre-moi immédiatement le portail, ou sinon, tu vas vraiment le regretter ! »
Pourquoi était-il si distant, si froid, si sec ? Jamais personne n’avait-été aussi proche de lui. Jamais personne de proche ne lui avait tant fait de mal. Lacerta était perdu, il en voulait à Hideki d’être parti, de ne lui avoir rien dit de son départ, de revenir sans aucunes nouvelles entre-temps, de le traiter comme une pauvre merde. Lacerta sentait la rage monter en lui. Jamais il n’avait ressenti cela auparavant. Il canalisa cette rage dans son pouvoir et le lança sur Hideki. Il utilisa sa proche chaleur pour alimenter son pouvoir.

« Pourquoi me traites-tu ainsi ? Pourquoi es-tu parti sans rien dire ?! »

Au fur et à mesure qu’il parlait, la voix de Lacerta se faisait plus forte.

« POURQUOI M’AS-TU LAISSÉ SANS NOUVELLES ?!! ET SURTOUT, COMMENT OSES-TU ME PARLER COMME ÇA ?!! »

Lacerta était en rage. Il mit quand même fin à son pouvoir, il sentait que son énergie le quittait et il devait quand même aller chercher un surveillant.

N’attendant aucune réponse de la part d’Hideki, Lacerta se mit en quête d’un surveillant. Il pensait à ce qu’il venait de faire et il se dit qu’au moins, Hideki ne mourrait pas de froid.

Transi de froid, je me cramponnais au portail, y mettant toutes mes dernières forces, comme si ma vie en dépendait. Je me redressais un peu, j’ouvrais mes yeux sur ce monde obscur puis je soufflais : un panache blanc s’échappait de mes lèvres, s’envolait dans les airs. Grelottant de froid, je sentis soudain une douce chaleur me traverser, agréable et légère : qu’est-ce qu’il m’était arrivé ? J’écarquillais les yeux d’étonnement : qu’est-ce qu’il s’était passé ? Peut-être le pouvoir de Lacerta… m’avait-il un peu donné de chaleur ? Je souriais très discrètement, sa bonté m’émerveillait.

«  Pourquoi me traites-tu ainsi ? Pourquoi es-tu parti sans rien dire ?! POURQUOI M’AS-TU LAISSÉ SANS NOUVELLES ?!! ET SURTOUT, COMMENT OSES-TU ME PARLER COMME ÇA ?!! »

Je sursautais, choqué par la voix colérique de Lacerta.
Instinctivement, je ramenais mes avant-bras devant mon visage en gémissant puis je fermais les yeux aussi forts que je le pouvais. J’attendais un coup, mais rien ne vint… lorsque je me sentais hors de danger – bien que j’étais habilement protégé par le portail – j’ouvrais un peu mes bras, ainsi que mes yeux. Mon cœur battait la chamade au fond de ma poitrine, et je ne pouvais m’empêcher de trembler, sentant comme si mes jambes allaient céder sous moi. Pourquoi… pourquoi m’avait-il crié dessus ? Il m’avait carrément incendié ?

Pourquoi… pourquoi semblais-je compter pour lui ? Est-ce que… est-ce que je lui avais manqué ? Est-ce qu’il… m’appréciait tant que ça ? Ses paroles m’avaient profondément choqué… c’était comme s’il tenait vraiment à moi, que mon départ, et que mon agressivité l’avaient réellement touchés… Je l’entends partir ! Je tendais un bras entre les barreaux du portail, au risque de me brûler la peau.

« Non, ne pars pas, je t’en prie ! Je suis désolé ! » Les larmes coulaient d’elles-mêmes. « Je ne voulais pas te faire de mal ! Ne me laisse pas ici ! »

Trop tard, je ne sentais plus sa présence. Je me laissais glisser de nouveau contre le portail, et je me ramassais au sol en pleurant. Je faisais déjà tout de travers… Lacerta avait été peut-être plus marqué que moi lors de notre rencontre… il m’avait disputé si violemment, il devait m’en vouloir à mort… j’avais encore de la chance d’être bloqué derrière le portail, je suis sur qu’il aurait tenté de me frapper ! Alors il m’appréciait donc… j’étais… son ami ? Et il était MON ami ? J’avais donc tout brisé… il me laissait seul, tout seul, dans le froid et probablement dans le gel… je sentais mes forces me quitter, je fermais les yeux, j’avais envie de m’endormir dans un petit lit douillet… je repensais à Lacerta : j’avais brisé une amitié naissante… il avait voulu être mon ami !



Je fus tiré de mes rêveries par le bruit de pas, ainsi qu’une voix grave. L… Lacerta était venu me chercher !? Je relevais doucement la tête : le portail était ouvert ! Je demandais d’une timide et craintive.

« Lacerta ? »

Je ramenais un peu mes avant-bras sur mon visage, comme si je craignais un coup : maintenant qu’il m’avait à portée de main, il pourrait me frapper… pourquoi était-il venu me chercher si il me détestait ? Il avait été si… violent… maintenant que j’y pense, il avait du demander de l’aide pour ouvrir ce portail… alors… est-ce qu’il tenait encore un peu à moi ?

« Pardon de t’avoir crié dessus… ce n’était pas mon attention, je ne voulais pas te faire de mal… » Je me confondais en excuses. « Je suis juste fatigué, je ne voulais pas rester ici… »

C’était la première fois que je me sentais si attiré par quelqu’un : ah, quelle emprise ! Quel sort m’avait-il donc jeté… c’était ça, l’amitié. Notre rencontre avait été si intense, j’avais du lui plaire… J'avais mainte fois pensé à lui, durant ses mois... mais ça n'avait jamais été aussi intense.

Après avoir déverrouillé le portail, le surveillant parti et dit :

« Occupe-toi de lui, moi, je pars. Emmène-le à l’infirmerie s’il n’est pas bien et sinon, aide-le à rejoindre sa chambre. »

Comme quoi ce surveillant n’avait pas changé.. Même si c’était une soirée assez troublante pour Lacerta, il avait quand même reconnu l’homme qui les avait aidés ce soir-là. Le soir de son arrivée à l’école, de sa première rencontre avec Hideki. Il lui semble même qu’ils avaient passé la nuit dans l’infirmerie mais ce souvenir était troublé par ce que l’infirmière lui avait donné.

« Lacerta ? »

Hideki se protégeait le visage. Mais de qui ? Lacerta essaya de trouver une quelconque forme de chaleur autour deux qui puisse être un attaquant mais ne remarqua rien.

« Pardon de t’avoir crié dessus… ce n’était pas mon attention, je ne voulais pas te faire de mal… Je suis juste fatigué, je ne voulais pas rester ici… »

Ses paroles avaient l’air sincère et Lacerta ne comprenait toujours pas pourquoi il avait été aussi détaché tout à l’heure. Mais maintenant qu’il avait entendu les excuses d’Hideki, il pensa que son.. Ami ? Était de retour.

« Retire ses mains de devant ton visage. Je ne te ferais pas de mal. Pas physiquement.. Et j’accepte tes excuses. »

Lacerta avait peut-être été un peu loin mais il était remonté à ce moment-là.. Il décida de s’excuser à son tour.

« Excuse-moi aussi pour tout à l’heure, je n’étais pas dans mon état normal.. »

Pourquoi s’était-il emporté ? Il n’avait parlé à Hideki que quelques minutes, peut-être des heures.. Hideki n’est qu’un inconnu normalement.. Il ne peut avoir tant d’emprise.. Tout au plus un ami mais Lacerta sentait qu’il devait être plus. La première personne, après son père, qui veuille bien l’aider sans rien en retour..

« Tu as besoin d’aller à l’infirmerie ?  Ce serait assez marrant comme situation.. C’est, au fait, assez marrant comme situation tu ne trouves pas ? »

Sur ce, Lacerta pris l’initiative de porter une valise pour aider Hideki. Il s’engagea à l’intérieur n’attendant pas de réponse immédiate, seulement qu’un ami (ou plus) ne le suive..

La morsure de l’hiver achevait d’engourdir ses petites mains : ses muscles ankylosés refusaient de bouger, son corps ne lui obéissait plus. Ses vêtements fins ne lui suffisaient plus, un dernier souffle de chaleur prêt à s’exhaler. Il tremblait, comme une feuille soumise aux courants du vent, comme un animal agonisant prêt à mourir. Des perles scintillantes roulaient le long de ses joues de satin, tandis que ses yeux opaques et  flous fixaient le ciel d’un air angoissé. Un souffle de chaleur tout prêt à s’exhaler… Si le chemin de Lacerta n’avait pas croisé celui du jeune aveugle, Hideki aurait passé la nuit ici.

« Retire ses mains de devant ton visage. Je ne te ferais pas de mal. Pas physiquement.. Et j’accepte tes excuses.   Excuse-moi aussi pour tout à l’heure, je n’étais pas dans mon état normal.. »

Les mains d’Hideki quittaient son visage pour au final, se poser sur ses genoux. Son regard glacé et hésitant se posait sur le jeune homme, Lacerta, et, sans un mot, Hideki se mettait en mouvement. Il esquissait d’abord un mouvement des jambes : une fois, deux fois, il les étirait. Un frisson de froid parcourut l’échine du jeune garçon, qui lui arracha un spasme. Puis, avec un élan de volonté, Hideki réussit à se remettre debout. Ses muscles le faisaient souffrir, mais il se devait d’aller de l’avant : qu’allait penser Lacerta, sinon ? Aussitôt debout, une douce sensation de chaleur lui gonfla la poitrine : Lacerta acceptait ses excuses. Tout de suite rassuré, Hideki ne se sentait plus vraiment en danger : il était en compagnie d’une connaissance, peut-être même d’un ami. De son ami.

« Tu as besoin d’aller à l’infirmerie ?  Ce serait assez marrant comme situation.. C’est, au fait, assez marrant comme situation tu ne trouves pas ? »

Hideki ne pensait pas qu’il avait besoin d’aller à l’infirmerie. Certes, il était gelé mais une fois à l’intérieur de l’Académie, il était persuadé que son corps se réchaufferait. Quand bien même il restait en hypothermie, il lui suffirait d’une petite couverture, ou de vêtements plus chauds. Mais il est vrai que si Hideki y allait, la situation aurait été plutôt marrante… lors de sa rencontre avec Lacerta, c’était Hideki qui l’avait découvert, gelé en pleine nuit, puis qui l’avait conduit à l’infirmerie ! C’était comme s’il se passait la même chose, mais que les rôles avaient été inversés. Hideki esquissa un faible sourire : à croire que rien n’arrivait au hasard… et si c’était un signe ? Le garçon fut de meilleure humeur.

« Non, pas besoin... C’est vrai, ça ! » Il eut un petit rire discret et adorable. « À croire qu’on est liés ! » Un sentiment d’embarras envahit Hideki : qu’est-ce qui lui avait pris de dire ça ? C’était ce qu’il pensait en son for intérieur, mais c’était relativement gênant de le dire à haute voix… ses joues devinrent cramoisies ; il se racla la gorge d’un air gêné. Hideki entendit le bruit des roulettes d’une de ses valises claquer contre le chemin pavé. Lacerta aurait-il pris une de ses valises ? Le jeune aveugle ne put s’empêcher d’être empli de gratitude, mais il se garda de lui dire tout de suite. Il lui emboîta le pas tant bien que mal, en transportant le reste de ses bagages. Alors que le cheminement allait bon train, Hideki se trouva un peu à la traîne. Il héla Lacerta d’un ton légèrement aigri et paniqué.

« Tu vas trop vite, j’arrive pas à te suivre ! »

Une fois qu’Hideki se retrouvait au niveau de son ami, ils reprirent la route ensemble. Il remarqua que Lacerta allait plus doucement, comme s’il s’adaptait au ryhtme du japonais. Ce dernier ne put s’empêcher d’être attendri. Quelle gentillesse… ils arrivèrent enfin dans le hall. Hideki poussa un soupir de soulagement et laissa tomber ses bagages au sol. Malheureusement, contre toute attente, la chaleur du couloir ne parvenait pas à le réchauffer, ne serait-ce que de quelques degrés. Il se frotta instinctivement les épaules, en cherchant un moyen de se réchauffer.

« Merci pour ton aide, L-Lacerta. » Hideki baissait les yeux : sortir des remerciements était chose rare pour lui, mais il avait l’impression que c’était important avec Lacerta et lui. « Je ne peux pas entrer dans ma chambre si je n’ai pas mon pass… » Hideki était craintif à l’idée d’être, au mieux accueilli à l’infirmerie pour la nuit, au pire être jeté dehors et envoyé dans l’hôtel le plus proche. Sinon, il y avait une autre solution… dormir ailleurs. Il ne savait où, mais ça restait possible bien que ça soit relativement difficile à supporter. « Tu… tu pars maintenant ? » Hideki se tournait vers son ami, le regard fuyant et l’air timide.

« Non, pas besoin... C’est vrai, ça ! À croire qu’on est liés ! »

Sur ce, Hideki fit une brève halte. Lacerta pensait qu’il devait être essoufflé mais il se remémora ses dernières paroles. Hideki devait s’être rendu compte de ce qu’il avait énoncé à voix haute. Pensait-il à une situation.. Particulière ? Liés ? Lacerta se surpris à sourire. Oui, il lui semblait qu’ils étaient liés. Cette rencontre. Deux fois de suite. Les rôles échangés. Tout pointait vers un destin commun. Il l’espérait en tout cas. Lacerta ne s’attachait jamais à personne et voilà qu’un jeune homme lui met pareilles idées en tête.

Un raclement de gorge le sortit de ses pensées. Lacerta continuait de marcher et il commençait à distancer le jeune homme.

« Tu vas trop vite, j’arrive pas à te suivre ! »

Alors Lacerta s’arrêta et attendit que le jeune homme le rejoigne. Ils reprirent la route ensemble et Lacerta fit attention à ne plus distancer son ‘’ami’’.

Peut-être devrais-je lui parler.. Ça fait si longtemps que je l’ai vu. Il doit avoir pleins de choses à raconter. Moi aussi j’en ai, des choses à raconter. Mais ce n’est sûrement pas le bon moment. Surtout que je le perçois bleu, froid. Très froid voir trop. Ce n’est pas bon. Nous devons rentrer au plus vite.

Dans le hall, Lacerta posa les bagages et Hideki en fit autant. Ce dernier soupira. Un soupire de soulagement. Mais bien qu’il fasse une chaleur d’enfer, Hideki n’arrivait pas à se réchauffer. Preuve en fut qu’il se frotta machinalement les épaules. Lacerta souhaitait faire quelque chose pour lui mais il crain de dépasser certaines limites. Jamais il n’aurait osé les dépasser. Surtout qu’il ne savait pas si Hideki partageait les mêmes.. Intérêts..

« Merci pour ton aide, L-Lacerta. » *Une pause* « Je ne peux pas entrer dans ma chambre si je n’ai pas mon pass… »

Mais bien sûr ! Et vue l’heure, ils ne trouveraient plus beaucoup de surveillants. Peut-être demander au surveillant de tout à l’heure mais il avait l’air agacé par la situation.

« Tu… tu pars maintenant ? »

Lacerta ne pu s’empêcher de penser à un enfant ayant peur du noir.. OH ! Quel idiot. Ils sont tout deux aveugles. Mais quelle quiche je vous jure !
Ne voulant pas partir de suite et surtout voulant rester auprès de son ‘’ami’’, Lacerta décida donc que franchir une ou deux limites n’allait pas mettre leur relation en péril.

« Je suis désolé mais tu vas devoir m’avoir sur le dos encore un petit moment. »

Il hésita.

ROH ! Et puis tant pis !

« Peut-être même toute la nuit, qui sait ? »

Sur ce il se rapprocha de son interlocuteur. Si proche qu’il pût sentir son souffle. Dans tous les sens du terme d’ailleurs. (Haleine mentholée. Pas vraiment ce qu’il aimait mais ça ferait l’affaire.) Et le prit dans ses bras. Activant son pouvoir sur toutes les parties de son corps en contact avec Hideki, Lacerta avait décidé de réchauffer du mieux qu’il pouvait son ‘’ami’’.

« Je te sentais très froid, désolé si ça te gène.. »

Il sentait que ses joues étaient cramoisies. Il s’en tapait au fond, il savait ce qu’il voulait.

« Je suis désolé mais tu vas devoir m’avoir sur le dos encore un petit moment. »

Hideki fut secoué par un léger frisson : qu’entendait-il par là ? Légèrement inquiet, le jeune aveugle couva Lacerta d’un regard plein d’incertitude : malgré cela, la réponse de son ami le satisfaisait au fond. Pourquoi ? Hideki était tout simplement très heureux de rester encore un peu avec lui… c’était son ami, et… cette aura confiante qui se dégageait de lui… Hideki ne pouvait s’empêcher de penser avec tristesse au moment où ils se quitteraient : dans la nuit, demain matin peut-être ? Le plus tard possible sera le mieux.

Hideki était légèrement troublé par cette affluence de sentiments qu’il éprouvait pour le jeune homme. Alors qu’il n’appréciait personne, d’habitude… était-ce son retour à l’Académie qui le rendait si… émotif ? Ou alors, c’était Lacerta ? C’était si… inexplicable. Hideki n’eut même pas le temps de réagir qu’un mouvement inattendu coupa court toute pensée, toute attention : le jeune aveugle se sentit prit dans une douce étreinte, délicieusement chaleureuse. Le cœur du jeune homme s’arrêta de battre : son corps, contre celui de Lacerta, si proches, si… fusionnels. Se faisait-il des idées ? Peut-être que oui, après tout. Une chaleur inhabituelle mais étrangement exquise se dégageait de Lacerta.

« Je te sentais très froid, désolé si ça te gène.. »

Le souffle doucement mentholé de Lacerta se déposait sur sa joue, alors que la chaleur devenait encore plus intense, à chaque seconde qui s’écoulait. Quelle était cette chaleur ? Hideki ne pouvait croire que c’était simplement le corps de Lacerta qui le réchauffait : mais bien sûr, son pouvoir ! Alors, mais alors… Lacerta l’avait-il pris dans ses bras uniquement dans le but de le réchauffer, ou bien… par affection ?

Hideki ferma les yeux, épris d’un plaisir oublié depuis trop longtemps : à ce moment-là, il aurait aimé que cette étreinte dure une éternité. Il ne se souciait plus du « pourquoi ? » : tout ce qu’il voulait, c’était profiter. Profiter de ce moment intime, trop précieux, qu’il sentait déjà filer entre ses doigts comme de la fumée insaisissable. Son corps était si chaud, son parfum si suave… aucun bruit autour d’eux…

Soudainement, Hideki se sentit mal. Pourquoi était-il si heureux ? Pourquoi, et comment, cette étreinte lui faisait tant de bien ? Les joues d’Hideki devinrent toutes cramoisies : était-ce la chaleur, ou son embarras ? Lui-même ne le savait pas. Stop aux « pourquoi » ! Ne se l’était-il pas déjà répété !? Lacerta était son ami. Ami. Ami ? Alors… pourquoi le serrait-il si intimement contre lui ? Sous ses doigts maigres, à l’intérieur de la poitrine gonflée et sans aucun doute musclée de son ami, Hideki pouvait presque entendre son cœur battre. À quoi pensait Lacerta, en cet instant ? Était-il tout aussi troublé que le pauvre Hideki ? Se disait-il que tout ça était… trop beau pour être vrai ?

Oui. Hideki pensait exactement ça. Tout cela était bien trop beau pour être vrai.  Après des mois de solitude, et de supplice chez son abominable frère, après la lourde décision de revenir à l’Académie… après ces longues minutes passées dans le froid, dans l’attente d’un espoir, Lacerta était parvenu à Hideki comme un véritable ange gardien. Alors que le froid maquait d’engloutir Hideki, la douce flamme de son ami était venu le sauver. Le jeune infirme avait souvent pensé à lui : à cette nuit si spéciale qu’ils avaient passé ensemble, cette nuit…  Le cœur d’Hideki se mit à battre la chamade dans sa poitrine toute frêle : il ouvrit ses yeux blessés et inexpressifs et posa son regard sur le visage de Lacerta : à quoi pouvait-il bien ressembler ? Il devait être si beau… Hideki se l’imaginait les traits fins, la face délicate et soignée. Le jeune garçon s’était rendu compte à maintes reprises que Lacerta avait été doté d’une musculature superbe, qui convenait parfaitement à un garçon comme lui. Et cette étreinte ne pouvait que le conforter dans cette idée.

Hideki aimerait tant rester comme ça encore pendant des heures… pourtant, le moment de se séparer se faisait imminent. Le jeune garçon avait l’impression que si Lacerta le lâchait, ils se briseraient tout deux en mille morceaux... Comme pour repousser cette terrible issue, Hideki passa ses bras dans le dos de Lacerta, serrant timidement son ami contre lui.

« P-pas tout de suite, c’est que… » Hideki se mordit la lèvre. Comment expliquer ce mouvement sans tomber dans le ridicule ? Lacerta ne comprendrait pas… sauf si son ami ressentait la même chose qu’Hideki ? Et encore ! Hideki ne savait même pas ce qu’il ressentait ! Pour ainsi dire, il n’avait jamais appréhendé de tels sentiments : Hideki aimerait tant mettre un nom sur ça… Il aimerait pouvoir savoir pourquoi cette personne lui faisait tant d’effets, pourquoi leur rencontre, puis leurs retrouvailles avaient été si magiques, pourquoi, pourquoi… « J’ai encore un peu froid. »

Cela lui faisait tant de mal. Sa poitrine toute entière passait dans un mixeur, sa gorge était si nouée qu’il avait l’impression de ne plus jamais pouvoir parler. Il aimerait que Lacerta le rassure, qu’il le comprenne… mieux qu’Hideki ne pourrait jamais SE comprendre. Tout allait trop vite, trop vite…

Pourquoi se prenait-il tant la tête ? La présence de Lacerta était si rassurante, si bonne… mais en même temps, si angoissante. Lacerta était vraiment quelqu’un d‘impressionnant, beaucoup trop pour le pauvre infirme. Et s’il lui en parlait ? Hideki avait tant envie de lui parler, ne plus se prendre la tête et simplement profiter de sa présence. Ils avaient beaucoup de choses à se dire après tout ! Hideki oublia un peu ses tourments, son coeur se défit de ses ombres. Il devait profiter de ce bonheur, de ce garçon qu’il appréciait, et qui l’appréciait tant en retour. Un sourire timide se dessina sur son visage.

« C’est ton pouvoir qui me donne si chaud, ou alors c’est toi ? »

Quelques secondes suffirent à Hideki pour qu’il comprenne que ses propos pouvaient être totalement déplacés, quand on y réfléchissait bien. Le visage du jeune garçon tourna au rouge écrevisse : la honte le submergea tant qu’il tenta de se dérober du regard de Lacerta en cachant son joli minois contre son épaule.

« Oublie immédiatement ce que je viens de dire ! »

Un rire embarrassé et nerveux s’échappa des lèvres d’Hideki. Entre ses bras, il se sentait comme un enfant. Il se sentait… heureux. Loin de ses soucis, et bizarrement, même très loin des tourments que Lacerta engendrait.

Lacerta sentait l’agitation qui régnait en Hideki. Il savait que cette étreinte n’était pas anodine. Pour lui s’était plus que d’aider un ‘’ami’’. C’était plus que de réchauffer une personne pour lui éviter de geler sur place. C’était plus que de simplement Le prendre dans ses bras. C’était sa manière à lui de lui avouer ce qui l’animait. Mais qu’est-ce qui l’animait vraiment ? Lacerta ne pouvait pas le savoir.. Il n’a jamais aimé qu’un père qui est mort trop tôt. Et puis, ça ne pouvait pas être normal. Deux garçons qui s’aiment ?

Jamais Lacerta n’y avait pensé. Il n’avait jamais tissé d’autre liens que celui de son ‘’ange gardien’’. Celui qui l’avait nourri, qui lui avait appris à survivre seul et surtout celui qui lui avait donné un instrument. Cet instrument était tout ce qu’il y avait de plus cher dans la vie de Lacerta. Il ne s’en séparait que brièvement et le chérissait comme s’il s’agissait d’un enfant. Un bébé, une chose en verre que même le plus petit choc pourrait briser. Mais ce n’était plus le cas. Il y avait autre chose que sa guitare. ‘’Quelqu’un’’. Alors le temps de cette étreinte sembla s’allonger à l’infini.
C’est lorsqu’il voulut se dégager qu’Hideki, que se dernier passa un bras pour rendre le câlin. Lacerta, déconcerté, ne savait plus quoi faire. Devait-il s’éloigner à toutes jambes ? Devait-il rester et continuer ce moment ? Devait-il mettre un point final à tout ça ? Ou bien raffermir sa prise ? Toutes ses questions se bousculaient dans la tête de Lacerta.

« P-pas tout de suite, c’est que… »

Mince alors ! C’est que ?? C’EST QUE QUOI ?! Bon calme toi, arrête de stresser, c’est un AMI rien qu’un AMI et il doit penser la même chose. Ou pire, il peut aussi avoir pitié de moi et juste me rendre mon câlin pour pouvoir mieux me laisser après. Type : « Ouais tu l’as eu ton câlin aller SALUT ! ».. Non il ne ferait jamais ça. Même si je ne peux en être sûr. Je ne l’ai jamais croisé qu’une soirée. Et maintenant aussi.. Mais je ne peux pas savoir ce qu’il veut.. Je ne peux qu’espérer.

Hideki n’arrivait pas à poursuivre sa phrase, comme s’il cherchait les mots justes. Lacerta attendit tout de même. Tout vient à point à qui sait attendre, comme disait l’autre.

« J’ai encore un peu froid. »

C’était faux ! Lacerta pouvait le percevoir, sa chaleur corporelle était redevenue normale depuis un petit moment déjà. Comment pouvait-il lui mentir là-dessus ? Avait-il déjà oublié ?

Mon dieu ! Enfin non, lui qu’il aille se faire mettre ! Mais enfin.. Hideki, que me veux-tu vraiment ? Qu’est-ce qui te prend ? Je ne sais pas si je pourrais répondre à tes attentes.. Je ne suis même pas sûr des miennes. Comment pourrais-je faire face à tout ça ? Je ne suis pas prêt.

« C’est ton pouvoir qui me donne si chaud, ou alors c’est toi ? Oublie immédiatement ce que je viens de dire ! »

Trop tard. Hideki rigolait nerveusement et Lacerta bouillonnait déjà intérieurement. Il comprenait mieux maintenant. Pourquoi est-ce que ça avait pris autant de temps ? Il se maudissait de ne pas avoir compris plus tôt ! Mais dans un sens, en arriver là facilitait la suite des évènements. Il savait maintenant qu’Hideki partageait avec lui certains ressentis. Il savait que le jeune homme était aussi désorienté voir plus que lui.

«  Et bien. Dans la logique des choses ce serait mon pouvoir. Mais..  »
Lacerta hésite, il ne sait pas comment aborder la chose. Doit-il y aller cash ? Ou doit-il essayer une approche plus souple, douce ? Il opte finalement pour une mitigée. Un mélange homogène entre les deux, du moins c’est ce qu’il souhaite.

« As-tu oublié ma vision ? Je perçois la chaleur et.. Je sais que tu me ment lorsque tu me dis avoir froid. Ensuite, j’ai arrêté mon pouvoir depuis un moment. Je ne voulais pas nous plus te brûler. Ce qui reste le choix où c’est moi qui te donne.. Comme tu l’as dit.. Chaud. »

Maintenant, toutes les cartes sont dans son jeu. Comment va-t-il les jouer ? Lui-même ne pourrait le savoir. La chance ferra le reste !

« J’ai finalement décidé de retourner à mon dortoir. Tu vas m’accompagner. Tu attendras devant la porte le temps que j’aille chercher de quoi se poser confortablement. Ensuite on ira se poser dans un coin tranquille. »

Le ton qu’empruntait Lacerta ne lui ressemblait pas. Il avait l’air déterminé.. Ou bien c’était la peur qu’il lui donnait paradoxalement ce courage ? Arrêtant de réfléchir à tout ça, il se dégagea de l’étreinte, pris les bagages qu’il pouvait d’Hideki et parti en direction du dortoir des Saphirs. Il se retourna un instant, bien qu’il pouvait savoir si Hideki avait bougé sans ‘’regarder’’ dans sa direction, et essaya de faire un coup de tête pour ainsi dire « Hey ! Suis-moi ! »

« Et bien. Dans la logique des choses ce serait mon pouvoir. Mais.. As-tu oublié ma vision ? Je perçois la chaleur et.. Je sais que tu me ment lorsque tu me dis avoir froid. »

Hideki se pétrifia. Un frisson le parcourut le long de son dos, le faisant convulser bizarrement. Comment… mais comment avait-il pu oublier ce détail !? La honte le fit rougir, encore davantage. Lacerta allait s’imaginer milles choses, maintenant qu’il savait qu’il avait menti… Ah ! Hideki s’était joliment fait avoir, il devait l’avouer. Un sourire nerveux étira ses jolies lèvres rosées. Pourtant, Lacerta n’avait pas encore fini.

« … Ce qui reste le choix où c’est moi qui te donne.. Comme tu l’as dit.. Chaud. »

Hideki pâlit : démasqué ! Bon Dieu, mais pourquoi avait-il ça !? Que pourrait-il répondre, pour se tirer d’affaire ? Que dire pour se rattraper ? Et s’il avouait simplement qu’il avait raison… ? Hideki se sentait si faible, maintenant que son argument venait d’être démoli et réduit en poussière. À vrai dire, l’infirme se sentait tout aussi démoli… Il se sentait mis à nu, percé, très frustré même ! Il était frustré de constater que Lacerta s’était montré plus malin que lui. Et puis, Hideki n’est pas très malin de nature, après tout… Le jeune garçon leva timidement les yeux vers Lacerta et avant qu’il ne puisse répondre, Lacerta reprenait avec une fermeté plutôt déconcertante.

« J’ai finalement décidé de retourner à mon dortoir. Tu vas m’accompagner. Tu attendras devant la porte le temps que j’aille chercher de quoi se poser confortablement. Ensuite on ira se poser dans un coin tranquille. »

Comme Hideki l’avait prévu, Lacerta le lâcha. Le jeune homme se sentait complètement dépossédé, abandonné. Le froid régnait, à l’intérieur. Son cœur devenait de glace, il avait envie de pleurer à chaudes larmes. Pourquoi ce ton si dur ? Qu’est-ce qu’il avait fait de mal ? Hideki se ressaisit : peut-être que c’était dans sa nature, d’être autoritaire… pourtant, l’infirme n’y avait pas encore remarqué. Après tout, ils se connaissait à peine ! Hideki fut saisi d’un frisson d’excitation : s’il devait être mené à la baguette de cette façon pour être à ses côtés, il se laisserait faire avec plaisir. Hideki rougit de honte : et dire qu’il avait envie de pleurer, quelques secondes plus tôt… quel enfant ! Un sourire confiant et tendre éclaira le visage bien sombre d’Hideki. Ils… ils allaient rester ensemble cette nuit. Cette pensée le comblait de joie. Et cette nouvelle facette de son ami, qu’il découvrait peu à peu… tout ça était excitant. Si excitant !

Hideki entendait déjà les pas de Lacerta s’éloigner, ainsi que le bruit des valises à roulette. Le jeune garçon se pencha, saisit les bagages restants et emboîta le pas de son ami avec un air déterminé, mais tout de même intimidé. Lacerta l’impressionnait et l’intimidait de plus en plus… encore un peu, et Hideki allait se mettre à bafouiller ! Son propre comportement l’étonnait : lui qui était si arrogant, si hautain d’habitude ! Et là, Lacerta le refaisait devenir un enfant… Au début, cela effrayait Hideki mais maintenant, ça l’amusait un peu. Près de Lacerta, il… n’avait pas peur. Il éprouvait un réel plaisir en sa présence, bien plus qu’avec son amie Sally. Avec lui, c’était si spécial… Lacerta a dit qu’ils se poseraient dans un coin tranquille : ils seront tout seuls, et ils auront toute la nuit devant eux !

Bientôt, Lacerta s’arrêtait. Il n’avait pas ménagé Hideki, avec ses longues jambes ! L’infirme profitait de cette petite pause pour souffler un coup. Il posa ses bagages au sol, et avant que Lacerta ne s’engouffre dans son dortoir, il demanda timidement.

« Tu ne me poses pas un lapin, tu reviens vraiment hein ? »

À vrai dire, Hideki n’attendait pas vraiment de réponse, il disait juste ça pour le taquiner. Hideki se sentait vraiment comme un enfant… pendant que son ami cherchait de quoi dormir dans le dortoir, Hideki s’assit contre le mur, à côté de la porte. L’infirme n’arrivait pas à croire que tout ce qui se passait était réel, il avait envie de se pincer le bras pour vérifier qu’il ne rêvait pas ! Mais non, tout cela était bien réel… aussi réel que cette étreinte qu’ils ont partagée, il y a de ça un bon quart d’heure… aussi réel que le froid hivernal, que ce vent qui vous glace jusqu’aux os ! Hideki sourit : il attendait patiemment Lacerta, les mains près du cœur, heureux.

Arrivés à la porte du dortoir, les deux ‘’amis’’ s’arrêtèrent. Lacerta entrait déjà dans les dortoirs qu’Hideki lança :

« Tu ne me poses pas un lapin, tu reviens vraiment hein ? »

Devrais-je répondre ? Si je l’ai emmené ici, c’est pas pour le laisser à la porte.. Bah ! Je vais lui faire une petite frayeur

« J’en sais rien, j’ai pas encore décidé », dit l’aveugle d’un ton sournois. « Peut-être vais-je revenir, peut-être pas. Seul l’avenir nous le dira.. »

Et sur ce, Lacerta entra dans les dortoirs. Il prit un temps calculé pour fermer la porte et un autre tout aussi calculé pour chercher des couvertures, oreillers et tout autre objet afin de faciliter leur nuit.

C’est arrivé dans sa chambre que Lacerta compris ce qu’il faisait. Voir son lit vide, imaginer dormir près d’Hideki.. Un frisson lui parcouru l’échine. Que faisait-il ? Cela faisait un moment qu’il n’avait plus tissé de liens avec quelqu’un. Il avait envie de s’y abandonner mais il avait aussi très peur. C’était un pouvoir d’une toute autre nature qu’il donnait de son plein gré à ce presque inconnu. Ils n’avait passé qu’une nuit avec Hideki et encore, les trois quarts tu temps dans les vapes. Comment pouvait-il lui faire confiance ?

Serait-ce comme dans ces vielles histoires ? Ces histoires où deux personnes, ensemble dans une vie antérieur, arrivent à se retrouver parmi les quelques milliards qui habitent cette Terre.. Impossible.. Ça ne peut être ça.. Et si c’est ça, que va-t-il nous arriver ?

C’est rempli de doutes que Lacerta, armé de coussins et de couvertures, rejoignis Hideki.

« J’ai pris un peu de temps désolé, mais je devais faire le moins de bruit possible. Outre ça, j’ai galéré à trouver de bonnes couvertures. » Il partit d’un rire trahissant toute sa gêne. « Bon, on y va ? Je ferais peut-être mieux de rentrer tes bagages dans mon dortoir, histoire de ne pas les remorquer d’un bout à l’autre de l’école. »

Il n’attendit pas de réponse et entama le dur travail. Mais que pouvait bien avoir Hideki dans ces valises pour qu’elles soient si lourdes ?

« J’en sais rien, j’ai pas encore décidé. Peut-être vais-je revenir, peut-être pas. Seul l’avenir nous le dira.. »

Hideki eut un petit sourire nerveux : rigolait-il vraiment ? Il secoua la tête, comme pour chasser ses mauvais pressentiments. Bien sûr qu’il rigolait, il ne serait pas du genre à l’abandonner comme ça, à lui faire un sale coup. Enfin, c’est ce qu’il croyait. Lacerta ouvrit doucement la porte du dortoir, probablement pour ne pas déranger ses camardes saphir qui devaient dormir à poings fermés. Quel homme attentionné…

Hideki attendait impatiemment, sans une légère pointe d’appréhension en songeant à ce qu’il allait se passer : où allaient-ils aller ? Et, ils seraient vraiment… seuls ? Un frisson indescriptible parcourut l’échine du jeune homme : était-il prêt à être confronté à une situation pareille ? Lacerta était-il paisible, ou tout aussi soucieux que lui ? Hideki espérait que son ami était bien moins préoccupé que lui, car si cette situation les stressait tout les deux, ils risquaient de passer un mauvais moment…

Et pourtant, rien ne semblait pouvoir altérer ce moment qu’ils allaient passer ensemble. Tout s’annonçait bien : Lacerta, si prévenant, si doux, si gentil avec lui… Hideki avait l’étrange sentiment que Lacerta veillait sur lui : c’était vraiment ça, l’amitié ? Le cœur du jeune homme lui faisait mal dans sa poitrine lorsqu’il pensait à la voix mielleuse et profonde de son ami. Dans un élan de tendresse, Hideki se disait qu’il aimerait passer toute la journée, puis toute la nuit suivante avec lui encore.

« J’ai pris un peu de temps désolé, mais je devais faire le moins de bruit possible. Outre ça, j’ai galéré à trouver de bonnes couvertures. Bon, on y va ? Je ferais peut-être mieux de rentrer tes bagages dans mon dortoir, histoire de ne pas les remorquer d’un bout à l’autre de l’école. »

Hideki sursauta : il ne s’était pas du tout rendu compte que Lacerta venait de revenir ! Il rosit, honteux d’avoir sursauté si facilement. Lacerta allait penser qu’il lui faisait peur... Remarque, c’était un peu le cas. Lacerta était très intimidant. Hideki se leva et s’apprêtait à lui répondre, mais le jeune homme s’engouffrait déjà dans le dortoir. Légèrement perturbé, Hideki bafouilla.

« D’accord… »

Lorsque Lacerta revenait enfin et refermait la porte, Hideki se rapprochait de lui et s’enquit d’une voix faussement énervée. « Tu en as mis du temps, j’ai failli m’endormir ! » Il sourit d’un air narquois. Il ne put retenir un petit rire amusé. « Désolé. » Son sourire disparut rapidement de son visage : où allaient-ils, maintenant ? Bien que Lacerta soit chargé comme un mulet, Hideki posa timidement sa petite main sur l’avant-bras de son ami, pour qu’il puisse le guider. Ils étaient si proches… l’odeur de Lacerta était totalement enivrante.

« Où est-ce qu’on va ? »

Hideki adressa un regard légèrement perdu à Lacerta alors qu’il serrait doucement sa main autour de son bras. Il n’avait qu’une seule envie : se blottir entre ses bras, et discuter avec lui jusqu’à l’aube. Pourquoi ressentait-il ça ? Il n’en savait rien : l’infirme se laissait simplement emporter par cette tempête de sentiments : peut-être échouerait-il sur une île, ou peut-être qu’il s’y noierait.