Journal mental de Ryo

Et bien... Je suis né deux ans avant Koji, et j'ai eu une histoire assez similaire à la sienne partant de là... J'ai peut-être été un peu moins chanceux, on va dire. On a grandi dans un environnement clairement favorisé. Nos parents étaient de grands inventeurs qui avaient déjà fait beaucoup pour le Japon, et qui possédait des sommes considérables. Ils travaillaient sur de nouveaux projets d'armes pour l'armée quand tout ça est arrivé. L'alliage Z devait être le métal le plus résistant jamais créé, presque indestructible. Il allait servir pour créer des machines sans failles, qui écraserait tout ce qui se trouverait sur leur chemin. Mais l'information a fuité, et c'est d'ailleurs la part de responsabilité du gouvernement dans cette affaire. La mafia la plus puissante du pays a voulu s'en emparer. Bien sûr, nos parents ont catégoriquement refusé de le leur donner. Ils se sont fait tuer. C'est presque certain. Mais ils ne réussiront jamais à trouver les armes, je le sais.

Selon les ordres de nos parents, j'avais emmené Koji avec moi le plus loin possible de ces gens et de la maison. C'était le début de notre fuite. Lui ne comprenait pas très bien, et je crois qu'il n'était même pas encore au courant de l’existence de l'alliage. D'ailleurs, je n'aurais sûrement pas dû non plus. Mais le fait est que, Koji avait toujours été doué pour ce qui relevait de la vitesse et du pilotage, et moi de la précision et du tir. C'était donc lui qui testait les appareils de déplacement que papa et maman construisaient. Mais lorsqu'il s'agissait d'une arme ou d'un outil de minutie, c'était mon tour. Je n'ai jamais été jaloux de lui, et lui non plus. Nous étions chacun heureux dans nos rôles. Mais c'est le mien qui m'a inévitablement mis au courant de l’existence du métal et des armes qu'il a engendré. Et je savais où tout se trouvait. Je l'avais senti venir. C'est pour ça que j'étais prêt à partir en cas de besoin.

Alors que nous prenions un court instant de répit, les gars arrivèrent. Merde, je ne pensais pas qu'ils étaient si rapides. Je les avais sous-estimés. Ils nous attrapèrent sans problème, assommant Koji mais me laissant bien éveillé pour assister au spectacle. Ils nous transportèrent jusqu'à une petite salle, où ils enfermèrent mon frère et m'attachèrent à une chaise. J'avais un sentiment d'impuissance insupportable qui me rongeais de l'intérieur, mais je ne pouvais rien faire. Malgré ses deux ans de moins, Koji était plus fort que moi, qui avait trop l'habitude des armes à feu ou de distance. Je n'avais absolument aucun moyen de nous défendre, ni moi ni lui. On commença à me questionner. Mon frère resta encore inconscient pendant un moment. Je restais muet. Jamais je n'aurais dit quoi que ce soit, surtout que je savais déjà ce qui était sûrement arrivé à nos parents. On me frappa, non, on me roua de coups, mais je ne disais rien. Seulement, Koji finit par se réveiller, et à ce moment, on se servit de lui pour me menacer. Lui aussi était paniqué, et ne comprenait rien de tout ce qui lui arrivait. Un homme pointa une arme à feu sur lui, et ne sachant toujours pas quoi faire, je continuais bêtement de nier. Jusqu'à ce qu'il mette sa menace à exécution. D'un grand coup de panique je criai pour qu'on l'épargne, et la balle qui devait lui être destinée sortit du pistolet chargé pour se forer un passage dans mon crâne. Je fus prit d'une douleur atroce, accompagnée d'un cri mélange de tristesse, de désolation et de rage. Je demandais pardon de ne pas avoir rempli ma mission.

Mais tout ne s'arrêta pas là. J'eus un instant cette impression de voler, de me rapprocher de mon frère qu'ils allaient emmener en enfer à son tour, mais je ne sentais rien, aucun frottement, aucune résistance avec la table ou même les sangles de la chaise. Tout était comme fantomatique et impalpable, je passais littéralement au travers. Je me rapprochais de Koji, si bien que finalement le lui rentrai dedans, comme dans tout le reste. Mais je n'allai pas plus loin. Je restai là, dans lui, et me sentis à nouveau bouger et respirer. Mais je ne contrôlais rien. Le coup partit, et alors que je m'apprêtais à mourir pour la deuxième fois, avec mon frère cette fois-ci, j'eus la surprise d'être avec lui traversé par le projectile, mais sans la moindre douleur. Ainsi nous nous enfuyions.

Plus tard lorsque nous fûmes à l’abri, je lui expliquai et je constatai que je demeurais en ce monde sous une toute nouvelle forme, celle d'un spectre sans la moindre influence. La seule raison qu'il me restait de « vivre » était de protéger mon frère, et très vite je perdit le goût du monde qui m'entourait. Mais je reste fidèle à la tâche, toujours, encore aujourd'hui, et je lui ai permis de fuir de nombreuses fois encore, conservant le secret de l'abri de l'alliage Z. Et puis un jour cette lettre, et la suite vous la connaissez.