Un dure retour à la réalité (Rp post Banquet)

Le docteur Rosalène buvait son café au lait, installée sur l'un de ces sièges incomfortables. Cependant, quand on travaillait à l'Agence, il fallait s'habituer à avoir mal aux fesses dans tous les sens du terme. Après les accompagnements de mourants, les voyages inter-dimensionnels, on lui avait donné une autre mission. Alors qu'est-ce qu'on avait comme patient aujourd'hui? Oh, juste un jeune homme avec une large entaille dans le dos, les poumons perforés, brûlé par électrocution, et on lui avait sommairement ouvert le ventre, juste ça. Cause de tout ceci? Un banquet. Et bien dis donc, les soupers de fête de famille ou d'employés étaient bien ennuyeux à comparer à ces festivités étudiantes. La jeune femme Ivoirienne but son breuvage tiède en continuant ses mots croisés. Neil lui avait refilé ce boulot précisant que c'était beaucoup trop ennuyeux. Regarder un patient mis dans un coma artificiel pour sa protection et celle d'autrui n'était pas la plus palpitante et il lui avait semblé comprendre que sa collègue voulait un peu de calme.

Il fallait cependant mettre une ligne entre travail calme et l'absence complète de tâches. Ils avaient des caméras de surveillance et les données de l'électro-cardiogramme étaient transmises aux employés en temps réel. La surveillance constante était de ce fait abusée, non? Enfin, il restait que le docteur Rosalène était payée, mais ce temps passé ainsi la laissait seule avec des pensées qu'elle préférait occulter. Elle tourna la tête vers le patient. Il était à la fois à plaindre et à envier. Dans cet état statique il pouvait avoir une pause de tout ce chaos, mais il se réveillerait bien un jour ou l'autre. Et comme Laworth et Warren, il la regarderait avec cet air de confusion et demanderait encore des réponses. À quoi servait-elle si on ne faisait que lui poser des questions auxquelles elle n'avait pas de réponses? Plus le temps avançait, plus elle réalisait qu'elle ne savait rien.

Ligne B verticalement. Il lance des flèches, ce n'est pas le pied quand on l'a au pied, elle empoisonne le sang. ... Un arc qui lance des flèches, un cor au pied et l'urée qui empoisonne le sang. Facile... Urgh... Eva ne trouvait aucun plaisir à ces fichus mots croisés et le bip constant commençait à lui taper sur les nerfs. Enfin, c'était signe que le patient était en vie au moins. Elle porta la tasse à ses lèvres pour réaliser qu'elle en avait déjà vidé le contenu. C'était malin ça... Elle n'était pas comme son collègue. Pour elle une tasse vide voulait dire stop, pour Neil ça voulait dire ''Veuillez remplir de nouveau''. Sa dépendance à la caféine était presque inquiétante. Presque. C'était un grand garçon, il n'avait pas besoin de se faire dire à combien de cafés se limiter.

Driiiiiiiiing. Était-ce possible? Ça ce n'était pas une sonorie de téléphone, mais celle d'une petite sonnette. Des spasmes involontaires pouvaient arriver, mais le son persistait. Se levant, Eva se dirigea vers le patient. Il était encore assommé par la morphine, mais ses yeux étaient bien ouverts, si ce n'étaient que vitreux avec toutes les substances injectées.

- Noa Greenwitch, de retour parmis les vivants. Je veux savoir si vous m'entendez. Faites moi un signe avec votre sonnette si vous comprenez.

S'il ne faisait rien, ou affichait un air vide et stupide, ça allait répondre à la question aussi, mais elle se doutait qu'il était en état de comprendre un minimum. Dans cet état de réveil, il pouvait respirer tout seul, ou du moins avoir une assistance respiratoire nasale au lieu d'avoir tout le tube. Étant formée dans la médecine, elle n'eut aucune difficulté à le libérer de ce tube ni à lui installer le reste de l'équipement.

- Restez tranquille, je me doute que vous avez bien des questions, mais je ne vous ferai pas de mal, sinon vous ne seriez même pas ici.

Et voilà, il pouvait désormais avoir la bouche libre, un incomfort de moins dans toute la panoplie, mais c'était déjà ça. Elle alla chercher un gobelet en plastique, le remplissant d'eau avant d'y mettre une paille.

- Je crois que c'est ça que vous devez attendre depuis longtemps, lui dit-elle, approchant doucement la paille de la bouche du jeune homme.

Le jeune homme vida en temps record son gobelet... Enfin, ces petits verres de plastiques étaient aussi grands que ceux pour les tests d'urine et ce n'étaient pas ça qui allait étancher la soif de quelconque patient. Toutefois, le jeune homme allait devoir prendre son mal en patience pour encore quelques temps. À peine réveillé, la voix rauque, il ne manqua pas toutefois de faire preuve d'une certaine politesse avant de poser les fameuses questions que tout le monde posaient en arrivant ici. Au moins, cette fois, Eva n'avait pas le rôle de lui annoncer sa mort iminente.

- Le Docteur Eva Rosalène... Et vous êtes dans l'un des locaux de l'Agence. Ça peut vous dire quelque chose, comme non, dans les deux cas n'ayez pas d'idées préconcues. Nous veillons sur l'Académie... en quelque sorte.

Même pour elle, ce n'était qu'une surface. Ce que faisait vraiment l'Agence était toujours un mystère. Le travail d'Eva était aussi absurde que d'alterner les paperasses administratives pour les nouveaux élèves, les sauver d'une situation potentiellement mortelle, aller les chercher dans une autre réalité... De quoi donner une migraine à n'importe qui et pour l'heure, le docteur trouvait qu'il en avait bien assez à gérer en ce moment.

- Vous souvenez-vous de tous ce qui vous a conduit ici? Prenez votre temps pour répondre.