Vous voulez, en plus de votre stupide petit questionnaire, me faire raconter mon histoire ?
La jeune femme soupira se prélassant dans son fauteuil, les jambes soigneusement croisées. Une domestique arriva dans la pièce et déposa un plateau sur lequel était soigneusement disposé des tasses, une théière un sucrier en porcelaine et quelques douceurs posées sur un présentoir à 3 étages. Lya tendit nonchalamment la main pour prendre un macaron à la vanille pendant que la domestique servait le thé. Elle croqua le macaron avant de reporter son regard sur le jeune homme qui tenait maladroitement sa feuille de question. "Quelle perte de temps ... Tout ça pour intégrer une académie perdue au fin fond de l'Angleterre" Son regard suppliant finit par agacer la jeune femme et elle se redressa dans son fauteuil.

Bon ... je vais vous raconter ma vie alors ouvrez vos oreilles car je n'ai ni l'envie ni la patience de me répéter...

Ma mère, Hélène , éminente professeur de théologie  de l'université d'Hambourg et mon Père Armand Tenebrae , un grand médecin reconnu par ses pères , sont tous deux de fervents catholiques et se sont rencontrés lors de ces séminaires religieux , pullulant de bonnes sœurs et de vieux prêtres jetant de l'eau bénite sur l'assemblée cloitrée dans les "saintes écritures".

La jeune femme lâche un soupire dédaigneux après ces paroles et boit une gorgée de thé avant de reprendre.

Enfin bref, quelques années plus tard, je naquis le 13 octobre 2001 à Hambourg. Dès mon plus jeune age, mes parents m'apprirent l'excellence , la vigueur et les bonnes manières digne d'une jeune fille de bonne famille. Je devais être pieuse, humble et soumises aux lois sacrées de la Bible qui trônait dans notre salon sur son pupitre en chêne. Je devais connaître le moindre verset de ce fichu livre, prier matin et soir , me laver le visage 4 fois par jour. Mes parents ne me trouvaient jamais assez pure et me punissaient à coup de ceinture à la moindre bavure. Jamais aucun geste tendre ou aimant. Rien qui ressemble de près ou de loin à de l'amour. Les seules moments qui pouvaient être emprunt à un semblant d'attachement était le moment ou ils me présentaient à leurs amis en me désignant comme leur "fille".
Des percepteurs venaient du monde entier m'enseignaient les lettres, la science et les mathématiques , les langues, la musique et le chant , le dessin, la danse classique, l’équitation, la broderie, l'art d'être une bonne jeune fille pour ne pas faire honte à mes parents lors de leur trop nombreuses soirées de bienfaisance ou ils aimaient à être vues. Malgré la piété que je devais avoir, ma mère aimait m'habiller avec la meilleure étoffe, me parer des plus beaux bijoux comme on présente une poupée de grande valeur. Et moi, je consentais à cette mascarade, travaillant mon visage pour toujours paraitre humble et reconnaissante ...

J'ai eu le meilleur enseignement possible, mais dès que j'eus 12 ans, je ne pus continuer à faire semblant d'adhérer à toute cette mascarade religieuse.
Je me rebella, ne pouvant croire en un Dieu imposant tant de règles arbitraires et injuste, ni même à son existence basé sur un simple livre, traduit, réécrit à de si nombreuses reprises. Cette doctrine me sortait par les yeux , je n'en pouvais plus d'étouffer dans tous ces psaumes et cette sacralité restrictive, m’empêchant de vivre pleinement. Mes parents me punirent plus souvent, plus violemment, m'obligeant à suivre des cours de catéchismes , à faire parties des enfants de cœur , à intégrer des chorales, à prendre des bains glacés après une nuit de jeûne et de prière. Mais chaque coup qu'ils me portaient, chaque regard empli de colère ou de dégout qu'il m'offraient fut ma félicité !

Grâce à eux, mon Négatif Cube se formait petit à petit ... A l'époque il n'était pas encore visible mais je sentais de profond changement en moi, quelque chose qui gonflait, mon corps qui s'éveillait tout comme ma force.  en plus de sentir ces changements, j'appris à résister à la douleur, aux larmes et à mes envies de crier quand mon père usait le cuir de sa ceinture sur mon corps. Il me fallut du temps pour arriver à résister à ces envies primaires mais au fur et à mesure je gardais le contrôle, mes larmes ne coulaient plus, et parfois j'arrivais même à sourire voir même à rire, le provocant délibérément sans jamais baisser les yeux. Mon père devenait fou et redoubler d'ardeur dans ces coups et dans sa haine envers moi. C'est à cette période là que mon cube apparut pour la première fois dans ma main droite et que je l'utilisais à sa puissance maximale pour repousser mon père et l'envoyer contre le miroir dans l'entrée. Il fracassa le miroir et retomba au sol dans un ballet d'éclat de verre tranchant. La scène me fit rire au plus haut point et je vis mes doigts, ma peau blanchir en prenant une légère teinte grise. En m'approchant de mon père, évanouit sur le sol , je pris un éclat de verre et croisa le regard de la créature aux pupilles rouges que je suis devenu. Mon cube tournait doucement dans ma main, rougeoyant de haine et de colère. Il m'envahissait d'une puissance incroyable et je le vis scintiller avant que je ne m'évanouisse à mon tour.

Ma punition à la suite de cet incident ne mérite pas d'être évoquée ici.

Quoi qu'il en soit , mes parents me haïssaient et me craignaient et m'envoyèrent en pension dans une école en France le temps d'une année, puis en Amérique pendant deux ans et la dernière année en Chine , espérant me brider par diverses autorités scolaires.  Ils m'éloignaient d'eux autant que possible sauf à Noël ou ils devaient m'accueillir à nouveau chez eux , m'évitant au maximum sauf à la veillée de Noël ou ils m'emmenaient avec eux à la messe, priant pour que le Seigneur les débarrasse de ce "démon" que j'étais devenue.

Mon père me regardait parfois avec dégout avant de  crier que je n'étais qu'un démon , une honte , une monstre.

J'aimais lui répondre "Mais, Père ... si je suis devenue tout ceci ... c'est uniquement de VOTRE faute ! C'est vous qui avez fait de moi ce monstre ! C'est votre dégout, votre haine, votre colère qui m'ont ainsi formés ! Je suis le fruit pourri de votre monstruosité !"

J'aurais très bien pu me morfondre, tenter de me repentir de milles façons pour que mes parents m'acceptent, m'aiment. Finir en pitoyable petite victime, se reprochant tous les maux du monde, se flagellant pieusement .. Mais je ne suis pas ce genre de personnes pathétiques.

Et puis il y a encore tant de haine, de jalousie à générer chez vous tous, abjectes petites êtres humains . Et puisque ma propre haine envers les hommes ne marche pas sur mon Négatif Cube, il va bien falloir que je me mêle à vous tous ...  Au moins , votre "Académie Tsuki" a le mérite de pouvoir m'aider à augmenter mes pouvoirs. J'ai étais surprise lors de l'arrivé de votre lettre de voir qu'il existait ce type d'académie spécialisé dans les personnes "à pouvoirs" ... L'Humanité n'est donc pas encore totalement inutile à ce que je vois ...

La jeune femme jouait avec la lettre de l'académie Tsuki reçue quelques jours plutôt, l'informant que l'académie était prête à l'accueillir pour l'aider à maitriser ces pouvoirs et que la rentrée était pour dans 3 semaines. Lya pressait le coin de la lettre contre sa bouche entr'ouverte, laissant une marque de lèvres rosée sur le papier blanc... comme pour bien montrer à son interlocuteur la "Fameuse" de l'Académie.

L'interlocuteur bégaya une question mais Lya l’arrêta d'un mouvement dédaigneux de la main. " Je suis fatiguée de vos questions et de votre présence. Vous pouvez partir, nous nous reverrons bien trop tôt à mon gout à la rentrée de l'Académie Tsuki !"

Délaissant le visiteur, Lya se releva et retourna dans sa chambre , jetant furtivement un regard à son reflet où des pupilles ensanglantées semblaient se réjouir d'aller dans cette nouvelle école ... !