Little Talks [PV ce cher Narok]

Le temps était doux en cette fin d’après-midi, alors j’ai décidé d’aller passer un moment à l’extérieur. C’est plutôt drôle, parce qu’en hiver je croise moins de gens dehors. La plupart des occupants de l’académie ont tendance à fuir le froid, mais moi, au contraire, je crois que ça me fait sortir plus souvent. Vêtue de mon manteau d’hiver noir, chaussée de mes bottes d’hiver plutôt banales avec de la fausse fourrure en haut comme c’est le cas de plusieurs modèles, ainsi que la tête dépourvue de quelque couvrechef que ce soit, je me suis dirigée vers le terrain d’entraînement, mains dans les poches à jouer distraitement avec ma bague de fiançailles.

Il était presque 16h et le soleil déclinait à l’horizon. Je n’ai jamais aimé le voir se coucher tôt pendant la saison froide, mais heureusement le solstice d’hiver est déjà loin derrière nous et l’astre du jour disparaît un peu plus tardivement à chaque nouveau jour. Enfin bon, avant ça m’embêtait que la lumière naturelle décline, parce que non seulement c’était déprimant, mais en plus ce n’était pas pratique, mais maintenant je peux au moins y voir un avantage.

Terrain d'entraînement désert, je m’en doutais. N’hésitant pas à prendre mes aises, je vais me placer en plein milieu en réfléchissant à ce que je pourrais faire. Au bout d’un petit moment passé à regarder d’un air absent la neige étendue au sol, je réalise que je n’ai jamais essayé de faire deux choses opposées en même temps. Il faut dire que l’opportunité ne se présente pas souvent non plus, mais avec l’éclairage actuel, c’est tout simplement parfait. Ça ne durera cependant pas, alors je ne perds pas de temps. Ok ! Alors on va dire, à droite : ombre, à gauche : lumière. Je n’essaie pas d’y aller d’un seul coup, je commence par le plus simple pour pouvoir passer au plus complexe par la suite. Donc, un petit cercle d’ombre sur la droite, bouahaha-c’est-trop-facile! Avec l’habitude, c’est à peine si j’ai besoin de me concentrer pour faire ça, en revanche, là je vais devoir faire un effort. Je me représente mentalement un cercle lumineux sur la gauche, sans pour autant oublier l’existence de l’autre cercle. Je fixe le sol en espérant que ça fonctionne, j’ai l’impression que les secondes durant lesquelles rien ne se passe s’étirent… puis la neige se met à briller d’une intensité se démarquant à peine de l’éclairage ambiant. C’est peu, mais c’est tout ce qu’il me faut pour être contente. Je lève les poings en l’air dans un signe de victoire, laissant au passage les cercles disparaître.

- YES !

Cependant, mon moment de joie est interrompu lorsque je prends conscience d’une présence derrière moi.

DE LA NEIGE ! Moi j’adore cette neige c’est un des rares événement météorologique avec l’orage que j’apprécie vraiment. L’orage, et bien pour à peu près les mêmes raisons que tout le monde, voir toute cette puissance que le ciel laisse tomber sur terre, toute cette force et cette rage, je trouve ça noble et excitant. La neige elle aussi me rend surexcité, mais pas pour les mêmes raisons évidemment, je trouve ça juste magnifique, même s’il ne neige pas mais qu’il y a de la neige partout, je trouve ça magique. Et aujourd’hui même s’il faisait froid je prenais mon temps à me balader pendant qu’Aliona était en cours, si elle avait été avec moi ça aurait inévitablement tourné en bataille de boule de neige, ça ne m’aurait pas déplu, mais c’est plus dur de profiter du paysage.

J’étais en train de traverser les jardins quand je vis passer plus loin devant moi une personne que je n’avais pas croisé depuis un long moment. Tori qui se dirigeait vers le terrain d’entrainement. Je ne sais pas trop pourquoi mais je m’étais arrêté tout de suite, j’avais mon grand manteau gris en laine qui m’arrivait aux genoux et je ne pensais qu’elle m’ait vu. Mais dans le doute je me repliai derrière un arbre pour voir ce qu’elle faisait. Je la suivis jusqu’au terrain d’entrainement en utilisant mon pouvoir pour flotter au-dessus de la neige et ne pas faire de bruit. Comme l’endroit était désert les bruits de pas de quelqu’un derrière elle l’aurait certainement alerté. Il était préférable de voler en toute discrétion. Surtout qu’avec mes gros rangers noirs je faisais pas mal de bruit à chaque pas sur le manteau blanc qui recouvrait les jardins.

Elle restait statique sur le terrain d’entrainement. Je pensais qu’elle s’entrainait, mais elle pouvait très bien repenser à tout ce qui c’était passé ici avec Noa, Marco, et l’autre que je n’avais jamais revu. Mais j’eu la confirmation de son activité quand je vis apparaitre un rond noir devant elle. Donc elle s’entrainait bien. Elle avait l’air très concentrée, et c’était une occasion parfaite pour lui faire peur. Tout en flottant, je me rapprochais d’elle tout doucement pour ne pas faire de bruit avec le vent dans mes vêtements. Ça me pris un moment comme je procédais avec prudence, et je n’étais pas encore certains de ce que j’allais faire pour lui faire peur. Je pouvais simplement me glisser derrière elle et lui faire un bon classique. Je pouvais aussi faire apparaitre un visage ensanglanté dans la neige qui remonterais vers elle, façon morte-vivante. Mais Halloween c’était passé depuis un moment ce n’était plus tellement le thème. Un père Noël ? Nan pareil Noël c’est passé. Quoi alors ? Bon bah un simple Bou suffira.

J’étais presque derrière elle et elle n’avait toujours pas bougé d’un pouce, toujours en pleine concentration. Je retins ma respiration et plaça mon visage à côté de son oreille. Mais juste au moment où j’étais en position elle fit apparaitre un cercle de lumière à côté de celui plus sombre, et elle poussa un grand cri de joie tout en me mettant son bras dans la tronche.

"YES"

C’est moi qui me suis fais avoir finalement, la surprise qu’elle m’avait offerte me fis atterrir directement et le choc me fis reculer m’obligeant à tomber le cul dans la neige. Je repris mes esprits rapidement et lui lança une petite pique pour signaler ma présence si elle n’avait toujours pas capté qu’un truc avait heurté son bras.

« Hey, c’est un peu mesquin comme vengeance tu crois pas ? »

Je me frottais un peu le nez par pur réflexe, même si ce n’était pas nécessaire et que je n’avais pas eu mal, mais c’est le genre de chose qu’on à du mal à ne plus faire, vérifier l’état de son corps quand on s’est mangé quelque chose. Ça m’arrivait encore même si la plupart du temps je pouvais simplement ignorer cette envie, mais là avec la surprise c’était retour aux fondamentaux. Je commençai à me relever et épousseta mon jean pour en retirer la neige tassée qui collait dessus et éviter que je ne garde le derrière mouillé avec de la neige fondu. Un fois debout je lui offris un sourire pour signaler que tout allait bien.

Mon bras a frappé quelque chose de dur, mais étant donné que je suis au beau milieu du terrain et qu’aucun obstacle ou quoique ce soit n’est supposé se trouver derrière moi, je suis surprise de ressentir l’impact. Ça me fait même sursauter et je me retourne vivement pour comprendre ce qu’il vient de se passer. J’écarquille les yeux et fais un pas en arrière malgré moi en découvrant qu’il s’agit de Narok, à présent par terre dans la neige.

« Hey, c’est un peu mesquin comme vengeance tu crois pas ? »

- N-Narok ?!

Qu’est-ce qu’il faisait juste derrière moi ? Au même moment, un vague souvenir de ce que Noa nous avait révélé à l’infirmerie l’été dernier me revient en tête. Je recule d’un autre pas en dévisageant le Saphir devant moi qui a eu le temps de se relever. J’ai de la difficulté à réaliser ce qu’il se passe. Je suis face à un gars qui nous a blessé plutôt gravement, mes amis et moi, puis qui est revenu en faisant comme s’il avait vaguement entendu parler de l’évènement. Il n’est même pas venu nous voir pour nous avouer que c’était lui et qu’il était désolé. À croire qu’il n’a pas regretté ses gestes. Je me passe une main sur le visage.

- C’est pas vrai. Pourquoi est-ce que t’as fait ça ?...

Après un instant, je réalise que ma question n’est pas très explicite et je n’ai pas envie de tourner en rond, alors je me dépêche d’ajouter :

- L’attaque. Noa nous a dit que c’était toi. Avant ça j’avais un doute, mais je voulais pas croire que ça puisse être vrai, puis il nous a subitement révélé que c’était toi derrière ce masque... À cause de ça, non seulement on a été blessés physiquement, mais en plus, il y a eu d’autres répercussions, comme Marco qui est presque devenu paranoïaque à force de craindre d’autres attaques du genre ou encore, Yumiko qui a voulu à tout prix me venir en aide, au point qu’elle s’est blessée et…

Je soupire.

- Je pense aussi à Astra qui a frôlé la mort par la suite. Figure-toi qu’elle, elle est revenue en risquant de se faire empaler par Noa, juste pour s’assurer que je m’étais remise des évènements. Elle est venue prendre de mes nouvelles ! Je sais pas ce que je dois penser de tout ça, je sais plus comment je suis supposée réagir, alors pourquoi est-ce que t’as fait ça ?

- N-Narok ?!

« Salut »

J’avais l’impression qu’elle me croyait mort et que j’étais un revenant qui voulait la hanter. Elle n’arrêtait de faire des pas en arrière comme si elle allait se mettre à courir. Pas très encourageant pour une retrouvaille après un long moment.

- C’est pas vrai. Pourquoi est-ce que t’as fait ça ?...

« Bah je voulais juste te faire une farce c’est pas la mort. »

A sa réaction on aurait dit que j’avais tué son chat, écrasé son chien, et en plus voler le dernier kinder bueno pour le mettre sur le tas comme une bougie.

- L’attaque. Noa nous a dit que c’était toi. Avant ça j’avais un doute, mais je voulais pas croire que ça puisse être vrai, puis il nous a subitement révélé que c’était toi derrière ce masque... À cause de ça, non seulement on a été blessés physiquement, mais en plus, il y a eu d’autres répercussions, comme Marco qui est presque devenu paranoïaque à force de craindre d’autres attaques du genre ou encore, Yumiko qui a voulu à tout prix me venir en aide, au point qu’elle s’est blessée et…

Ha ouais ok… elle parlait de ça donc, ça prenait déjà plus de sens. Mais après tout ce temps, quoi ça faisait … bien plus d’un an, bientôt deux. Je pensais qu’elle n’aurait pas abordé le sujet et qu’elle serait passé à autre chose. Elle poussa un soupir, bon au moins elle ne s’est pas mise à pleurer.

- Je pense aussi à Astra qui a frôlé la mort par la suite. Figure-toi qu’elle, elle est revenue en risquant de se faire empaler par Noa, juste pour s’assurer que je m’étais remise des évènements. Elle est venue prendre de mes nouvelles ! Je sais pas ce que je dois penser de tout ça, je sais plus comment je suis supposée réagir, alors pourquoi est-ce que t’as fait ça ?

Pour Marco le faire devenir à moitié parano n’était pas plus mal, il avait pas tellement de confiance en lui en premier lieu mais au moins rester sur ses gardes ne faisait de mal à personne. Et pour Yumiko… je regrettais qu’elle se soit mise en dangers pour ça mais de toutes manière elle ne pouvait pas s’en empêcher, et puis si c’était son choix, alors c’était son choix et c’est tout. Elle l’avait fait en connaissance de cause. Le fait que ma partenaire ait frôlé la mort pour venir prendre des nouvelles de tout le monde me laissait assez perplexe. Son pouvoir la poussait à avoir une vision prudente des choses et à ne pas se mettre en danger inutilement. Or aller les voir et se faire violenter par Noa, c’était inutile. Je mis mes mains dans mes poches pour les préserver du froid, ça allait être long. Mon visage lui s’affichait avec un air blasé et figé dans une expression de patience.

« C’est pas comme si j’avais eu le choix. Une fois là-bas on nous à pousser à nous entrainer et on nous à donner des pilules pour booster nos capacités, c’était bien au début. Mais après ils nous ont donné l’ordre de partir à l’académie pour vous tuer. Déjà que je sache je me suis arrangé pour ne tuer personne. Et d’un autre côté j’ai d’abord voulu refuser pour me faire la male mais je n’ai jamais pu trouver l’occasion de partir, eux ils m’ont senti hésitant d’abords, quand j’ai refusé ils m’ont dit qu’ils connaissaient ma famille et que puisque je n’avais plus de père ça serait dommage de ne pas profiter du dernier parent qu’il me reste. Le choix a été vite fait, désolé mais j’ai joué mes cartes comme j’ai pu. J’ai donné le change au maximum, vous donnant le plus de temps possible et vous blessant suffisamment qu’il soit convaincu et n’engage pas de représailles. »

Je poussai un soupir à mon tour.

« Je suppose que je devrais être content que tu me pose la question ce qu’il c’est passé. Toi au moins tu l’as fait. Noa par contre il n’a pas dû vous dire qu’il m’a directement attaqué en essayant de me tuer, non pas qu’il ait réussi mais il n’a rien voulu entendre et est devenu violent tout de suite. D’un autre côté je pense avec du recul que ça eu un effet bénéfique sur vous, après ça tout le monde à cherché s’améliorer pour ne pas revivre ça. Moi compris, j’ai pris mes dispositions pour protéger ma mère et personne ne peut me plier à sa volonté désormais. »

« Et je te contredis, j’ai pris de vos nouvelles, je ne suis pas venu directement vous voir parce que je pensais que vous alliez me reconnaitre et que ça allait partir comme avec Noa et Astra. Mais j’ai pris de vos nouvelles de loin, demandant comment vous alliez discrètement pour suivre votre rétablissement. Si j’avais pu vous soigner moi-même je l’aurais fait, mais je n’en étais pas encore capable à l’époque. »

« Après t’en penses ce que t’en veux, si tu refuses de me parler alors c’est ton choix et personne ne t’aura obligé à le faire, personne ne te force la main. C’est toi qui décides »

Voila j’avais balancé toutes les infos importantes. Je devais m’estimé heureux que Marco lui ne m’ait pas fait le même coup puisque je pense qu’il aurait été entre le Tori, le Noa et la dévastation. Du genre imprévisible dangereux.

J'avais les sourcils froncés, non pas par colère, mais parce que je voulais comprendre et j'essayais de me concentrer sur la réaction de Narok. Je n'ai cependant pas tardé à relâcher les muscles de mon visage, au fur et à mesure que les informations venaient.

Après quoi, j'attends un moment pour savoir s'il va ajouter autre chose, mais ce n'est pas le cas, alors j'expire longuement, comme si j'avais retenu mon souffle pendant tout son temps de parole. Je me penche même vers l'avant en appuyant mes mains sur mes genoux. Peut-être que j'ai vraiment arrêté de respirer pendant un certain temps sans m'en rendre compte, je ne sais pas. En revanche, ce qui est sûr, c'est que rien que le début des explications a suffit à me convaincre.

- D'accord, c'est ce que j'espérais.

Je me redresse pour le regarder d'un air désolé.

- J'espérais que tes actions aient été justifiées par des raisons autres qu'une envie de puissance. Je dois avouer que... vu les menaces, les options étaient vraiment limitées... Désolée, je retire ce que j'ai pu dire.

Je ne veux pas imaginer ce que j'aurais fait si j'avais été à sa place. Avoir la vie de ma famille et peut-être celle de certains proches comme Venda en jeu. Rien que d'y penser, ça m'étouffe. Et ce n'est sûrement pas la distance avec l'Amérique qui aurait été un obstacle... Mais l'option de tuer des gens est tout aussi horrible.

- Tu as très probablement fait ce qu'il y avait de moins pire... Merci.

Je ne croyais pas pouvoir dire ça, mais je n'ai plus la moindre raison de lui en vouloir après ce qu'il m'a raconté. Je lui tends même les bras.

- C'est cliché, mais un câlin et on passe à autre chose ?

Je n’étais pas forcément surpris de la situation, mais plutôt surpris par sa réaction. C’est comme si je m’attendais à ce qu’elle commence à m’attaquer en criant un truc du style « HOORRSS SUJET !!!! » ou « OBJECTION !! » J’en sais trop rien. Mais le chose sûr était que je ne pensais pas que ça allait rester aussi calme très longtemps, j’avais même dans l’idée que Noa surgisse et n’attaque, tout ceci n’aurait été qu’une diversion pour porter un coup fatal. Ce n’était pas très plausible, mais dans le doute, même si ce n’était qu’une idée saugrenue que mon cerveau avait trouvé entre une poche de LCD et le pancake de l’incompréhension, je mobilisais mon pouvoir pour parer à toute attaque, gardant mon attention sur Tori.

- D'accord, c'est ce que j'espérais.

C’est ce qu’elle espérait. A n’en pas douter oui. Dans ce genre de situation, tout le monde espère qu’il y a une raison logique et que personne n’a eu le choix, que ce n’était dépendant de la volonté de personne, ce n’était simplement pas de chance. Et même si c’était le cas présentement. Mes yeux étaient dans une expression de surprise de d’incompréhension… sans que je ne m’en rende trop compte. Je le savais dans un coin de me tête, mais j’attendais la suite, le prochain coup. Je l’observais un peu partout, cherchant quelque chose qui me dirais, « Ouais nan, t’as cru ? Laisse tomber c’est pas ça. »

- J'espérais que tes actions aient été justifiées par des raisons autres qu'une envie de puissance. Je dois avouer que... vu les menaces, les options étaient vraiment limitées... Désolée, je retire ce que j'ai pu dire.

Je ne comprenais pas, quelque chose ne tournait pas rond. Il y avait un problème quelque part, mais je ne savais pas quoi, et ça ne me rendais pas fou, mais je sentais quelque chose d’étrange. Je ne savais pas ce que c’était. Je me sentais observé de partout, comme s’il on cherchait un angle d’attaque, une faille, et je ne comprenais pas pourquoi je n’arrivais pas à voir ce qui m’observait. Mais pourquoi désolé ? Dans aucun univers possible c’était à elle de présenter des excuses. Le plus attendue aurait été qu’elle me gifle et me demande des excuses, pas l’inverse. Je devais la gifler ? je sais plus.

- Tu as très probablement fait ce qu'il y avait de moins pire... Merci.

Ça y est, l’attaque, je le savais, je m’en doutais. Dans un réflexe, quand elle écarta les bras, mon regard se baissa vers le sol pour observer son ombre, pour observer le terrain, le diable allait sortir de sa boite, et plus vite je savais où, mieux ce serait. Je tournais également la tête et le corps, me repliant légèrement sur moi-même, dans un reflexe pour cacher mes points faibles, prêt à accuser le coup. Vas-y, c’est bon, je suis prêt.

- C'est cliché, mais un câlin et on passe à autre chose ?

Pardon ? Je rouvrais grand les yeux ne comprenant pas. Pourquoi ? Je la regardais alors que ma vision devenait floue. MERDE ! J’étais tombé dans le panneau et j’avais raté le plus important ! Qu’est-ce qu’elle à fait ! Pourquoi j’y vois plus rien ! Qui l’avait aidé ! Je sortis les mains de mes poches pour les passer sur mon visage, tentant de comprendre ce qui m’arrivait pour retrouver la vue ! Au contacte de mes yeux, mes mains touchèrent quelque chose de chaud, d’humide, je sentais des picotements sur ma peau alors que mon sang réinvestissait les zones abandonnées au froid. Tu te fous me gueule ? C’est des larmes là ? C’est quoi ce délire ? C’est pas parce que c’est la seule personne qui ait pu me comprendre depuis cet événement que forcément j’allais être touché ou un truc du genre ! Même Lucy elle ne m’avait pas montré autant de compréhension en si peu de temps. Et alors ça fait quoi ? ça fait… ça fait du bien putain.

En un éclair, je me jetais dans ses bras, la petite Tori, la soulevant dans le geste pour pouvoir la tenir contre moi sans qu’elle ne soit plié en deux ou que je sois à genoux. J’avais même utilisé mon pouvoir pour me déplacer, sans m’en rendre compte, je n’avais pas fait un seul pas, j’avais glissé vers elle en un clin d’œil. J’avais les yeux humides, je ne pleurais pas, mais les larmes étaient toujours sur mes yeux, reposant sur mes paupières. Si je clignais des yeux, elle tomberaient, et je ne voulais pas, si elle roulaient sur mes joues je ne pourrais plus sauver la face en disant que j’avais simplement les yeux humides à cause du froid.

on passe à autre chose ? Passer à autre chose ? Je ne sais pas. J’avais l’impression de l’avoir fait il y a longtemps. Mais finalement ce n’était peut-être pas le cas. Devoir tout le temps regarder pardessus mon épaule à savoir si quelqu’un allait jouer les héros et vouloir abattre le loup dans la bergerie. Le mouton noir que tout le monde se forçait d’ignorer. Personne ne voulait vraiment penser au fait que quelqu’un qui avait attaqué l’académie puisse y rester après ça, et le meilleur moyen de ne pas passer à quelque chose, c’est de faire comme si ça n’existait pas. Noa lui s’efforçait se prendre sa revanche à sa manière, en montant tout le monde contre moi. Se contentant de donner sa version des faits et rien d’autre, se faisant passer soit pour un héros soit pour un martyr. Lucy elle était tout simplement partie. Abandonnant tout ce qu’on avait, laissant l’académie derrière elle. J’avais été forcé de faire quelque chose, et je n’en prenais que des reproches, personne ne s’était mis à ma place. Personne n’avait cherché à comprendre. Personne sauf Tori.

Je restais là. Tenant la petite québécoise dans mes bras, ne sachant absolument pas quoi faire ensuite. Je la serais trop fort ? Je ne sais pas. Si je desserrais est-ce que ça donnait l’impression que j’en avais marre ? Ou je alors je l’étouffais complétement et elle n’osait pas le dire. Ses pieds touchaient par terre ? Je ne sais pas, je ne crois pas. Est-ce que je me penchais pour qu’elle puisse toucher le sol ? Ou alors ça lui donnerait le sentiment d’être trop petite et ça la mettrais mal à l’aise. Je ne sais pas, j’étais perdu. Je remettais tout en question et je ne savais pas quoi faire. Mon seul espoir était qu’elle prenne les devant.

Juste avant que je ne lui propose le câlin, il était sur ses gardes et ça se voyait clairement. Pourtant je n'avais l'intention de poignarder personne ce soir, donc en faisant ma proposition, j'ai tâché d'avoir l'air d'être la moins menaçante possible. La surprise n'avait alors pas tardé à se lire sur son visage et sans doute dans le mien aussi, après avoir remarqué que ses yeux s'étaient remplis d'eau. Après tout, Narok ne semblait pas être quelqu'un qui laisse facilement ses émotions prendre le dessus.

À peine quelques instants plus tard, je me retrouve dans ses bras, n'ayant même pas eu le temps de comprendre ce qui venait de se passer, tellement l'enchaînement d'actions avait été rapide, mais l'essentiel était juste là. L'essentiel était que Narok ait accepté le câlin. Je crois qu'on en avait tous les deux besoin. 

Je ne sais pas exactement combien de temps s'est écoulé lorsque je me rends compte que mes pieds ne touchent pas par terre. Je réprime alors un rire pour ne pas avoir l'air de me moquer de quoique ce soit. J'aurais dû m'en douter, c'était étrange aussi d'avoir l'air d'être de la taille de Narok, alors que je dois habituellement lever la tête pour le regarder. Mais bon, s'il arrive à me soulever sans que ça ne soit trop pénible pour ses muscles, je ne me plaindrai pas ! Ça prouve juste que, soit il est fort, soit je suis plus légère que je ne le pensais.

Je laisse encore un moment passer, puis ne pouvant plus y tenir, je demande d'un ton amusé :

- Tu t'en sors ? Je ne suis pas trop lourde à porter ?

Après tout, je voudrais lui éviter de se fatiguer rien que pour un long câlin. Au bord du rire, j'ajoute :

- Je sais que je suis petite, mais je dois tout de même peser quelque chose.