Yumiko, une guérisseuse généreuse

Yumiko est née une soirée d'hiver dans une famille importante par sa richesse et sa notoriété. Quelques années de pur bonheur passèrent : traitée comme une princesse, ses parents l'aimèrent de tout leur cœur. Elle était telle une enfant bénie des Dieux. Mais lorsque cette dernière se dévoila sous la forme d'un pouvoir de guérison, le rêve devint cauchemar. On entreprit d'enfermer l'enfant dans une cage, sous la maison. Noire, humide et inconfortablement meublée, elle devint aussi bien la prison que la chambre de la petite qui ne comprit pas ce qui arrivait. Alors, pendant de longues journées, elle pleura en appelant ses parents chéris. Mais personne ne vint à part une servante choisie pour lui apporter ses repas et nettoyer la cage. Comme elle n'était pas entendue, malgré sa tristesse, Yumiko cessa de pleurer vainement après trois jours de sanglots incontrôlables et de cris perçants.

Pendant deux ans, elle resta dans sa nouvelle demeure, tournant en rond, rêvassant à la vie qu'elle aurait pu avoir. Elle entendait parfois les domestiques s'affoler au-dessus de sa tête. Mais, lorsqu'elle tentait d'en demander la raison, personne ne lui répondait. Pas même la personne qui venait régulièrement. Pendant cette période, elle apprit seule à mettre un kimono, seul vêtement qu'elle connaissait. A sa fenêtre venaient chanter des oiseaux. La petite aimait les écouter pendant des heures. Mis à part les berceuses que lui avait chanté sa mère, c'était la seule musique qui raisonnait dans son cœur endolori par l'abandon. Après cela, petit à petit, on l'autorisa à sortir de sa cage. La seule condition était qu'elle n'adresse pas la parole à ce qui aurait dû être sa famille. Elle fut aussi autorisée à étudier avec une domestique sévère, mais pas trop injuste.

Un jour, alors qu'elle se promenait dans la maison, entourée de deux femmes chargées de la surveiller, elle vit ses parents accompagnés d'une petite fille. Celle-ci ressemblait beaucoup à sa mère, mais avait les cheveux et les yeux semblables à ceux de son père. Estomaquée, elle s'arrêta et les regarda passer. Les hurlements et les pleurs qu'elle aurait voulu extérioriser restèrent coincés dans sa gorge en feu. Bien que douloureux, cela lui permit de ne pas rompre l'engagement qui lui permettait de sortir de sa prison. Depuis ce jour, elle nourrit une haine sans nom à l'encontre de ses géniteurs. Elle ne comprenait pas pourquoi elle devait subir cela. Elle ne savait pas pourquoi sa sœur, puisque c'est ce qu'était cette fillette, avait le droit à un traitement de faveur. C'est ainsi que la jeune fille, qui atteint bien tôt ses 14 ans, en vint à vouloir quitter ce monde pour un meilleur.

Quelques mois après son quinzième anniversaire, par une belle journée de printemps, Yumiko entendit des exclamations des domestiques. Comme elle avait l'habitude de les entendre à longueur de journée, l'adolescente su que ce n'était pas comme d'habitude : quelque chose de nouveau s'était produit dans la maison. Très vite, elle se désintéressa de l’événement et se concentra à nouveau sur ses amis les oiseaux. Mais, quelques minutes seulement après, ces derniers s'envolèrent à l'approche bruyante d'une personne qui descendait les escaliers. C'était la domestique chargée de lui apporter ses repas. Elle était essoufflée et de la sueur coulait à grosses gouttes sur son front. Sans un mot, elle ouvrit la porte de la cage, puis elle l'invita à la suivre. Comme elle ne répondait pas à ses question, la jeune fille obtempéra et la suivi... jusqu'au bureau de son père. Que lui voulait-il, après tant d'années? Alors qu'elle se tenait debout devant lui, il la regarda d'un air sévère et calculateur avant de poser son regard sur une enveloppe blanche sur son bureau. Un silence pesant et suffoquant s'installa pendant de longues minutes. Yumiko ne parla pas : elle n'en avait pas le droit, après tout. Et lorsque son géniteur le fit, ce fut d'une voix dénuée de sentiment, glaciale. Il lui apprit qu'elle avait reçu une invitation pour entrer dans l'académie Tsuki et que c'est dans cet endroit qu'elle était sensée rester jusqu'au moins sa majorité.

Enfin libre, l'adolescente fit ses valises et partit peu de temps après pour entamer sa nouvelle vie.