Tic-tac, tic-tac, tic-tac, tic-tac… Je vais m’endormir. Tic-tac, tic-tac, tic-tac,tic-tac… Foutu horloge. Tic-tac, tic-tac, tic-tac, tic-tac… Je pense à elle. Tic-tac, tic-tac, tic-tas, tic-tac… Foutu cours. Tic… Zzzzz… DRIIING !
Je me réveille en sursaut, légèrement perdu. Je suis dans ma classe ? Ah oui. Mon cours, j’oubliais.
Monsieur, où est ce qu’on doit vous mettre nos travaux ?
J’incline doucement ma tête sur le côté. Leurs travaux… Leurs travaux… Oh, c’est vrai. Le cours a servi à les évaluer sur leur façon d'appréhender le surréalisme. Raison pour laquelle mon manque de sommeil m’a rattrapé. J’ai du mal à dormir ces temps-ci. Il me suffit donc d’une simple pause pour trouver le moyen de fermer l’oeil. Sans que j’y puisse vraiment quelque chose.
Je passe mes mains sur mon visage en grommelant.
Amenez-les feuilles sur le bureau. Pour les toiles, laissez-les sur le chevalet.
J’observe les élèves venir un à un au bureau pour me déposer leur pathétique oeuvre - si on peut appeler ça comme ça - puis sortir en marmonnant quelques politesses. C’est ça bande de faux-culs, bonne journée à vous aussi. Comme si vous disiez ce que vous pensez réellement. Au moins, ils n’ont pas l’air d’avoir remarqué ma paresse durant le cours.
Je m’appuie contre le dossier de ma chaise. Les dessins s’étalent devant moi. Peut-être trouverais-je enfin quelqu’un avec un minimum de talent. Quelle ridicule pensée. ...mais ça ne coûte rien de jeter un coup d’oeil.
Je remonte mes pieds sur ma chaise et cale ma tête sur ma main, le bras reposant sur l’accoudoir. Position peut être bien trop nonchalante mais j’ai une heure de temps libre. Donc personne pour me voir ainsi.
Mes yeux parcourent la pièce. En parlant de position nonchalante, j’aimerais beaucoup installer quelques poufs dans la salle. Et peut être un canapé au fond de la salle. Après tout, on dit qu’une atmosphère détendue permet une meilleure créativité. Quoiqu’avec ma présence, ce genre d’atmosphère n’est pas tout à fait compatible.
Je tire vers moi un premier dessin. Sa vue me fait pousser un long soupir de désespoir. J’aurais du faire prof d’art dans une grande école de dessin. Le métier aurait sûrement été plus intéressant que ces gribouillages d’enfant.
Les quelques dessins qui suivent ne sont pas bien mieux. Ce n’est sûrement pas aujourd’hui que je trouverais la perle rare.
Je me lève et traverse la classe en direction de l’arrière-salle. Cette pièce exiguë regorge de choses diverses. En particuliers mes propres oeuvres. Raison pour laquelle je n’autorise personne d’autre que moi y accéder. Et pour laquelle, c’est toujours fermé à clé. Je sors par ailleurs ces dernières et déverrouille la porte. La lumière vient rapidement éclairé le débarras, à ma plus grande satisfaction, plutôt grand. J’entre à l’intérieur pour observer mon jardin secret couvert de Bob l’éponge, de reproduction de grands artiste et plus récemment, d’un portrait de Juliette. Un jour, je devrais vider cette pièce. Avant que quelqu’un ne tombe dessus par le plus grand des hasards.
Un immense panneau au fond de la pièce intrigue mon regard. Un tag commencé il y a longtemps et jamais fini. Ce tag est plutôt sombre, vacillant entre le rouge et le noir. Sanguinaire et obscure. Une fois finit, je suis persuadé qu’il peut être magnifique. J’entreprends donc de le sortir à l’extérieur pour l’installer contre un mur. Une bâche vient s’y ajouter ainsi qu’une multitude de petites bombes de peinture. Je m’équipe d’un masque pour ne pas respirer leurs odeurs nocives.
Ne manque plus qu’un peu de musique. Bien heureusement, la salle est équipée d’enceintes. J’y branche mon ordinateur portable et lance l’une des merveilleuses symphonies de Chopin.
Plus rien, ni personne, ne peut me déranger.