"Time for a Resurrection !" [libre] ~~

Cela faisait plusieurs mois -si ce n'est même une année- que notre petite jeune femme était restée cloîtrée chez elle. Restant dans sa chambre, ne faisant que le stricte minimum vitale, sortant seulement dans le but de se nourrir et n'allant en cours que très rarement. Elle s'occupait elle-même de suivre le programme, studieuse élève Saphir qu'elle était, et passait la majeur partie de son temps à s'atteler à sa passion ; l'art. Ce passe-temps était d'ailleurs devenu son petit gagne-pain de temps à autres, payée une petite dizaine de sous pour réaliser un portrait ou bien un certain paysage selon les envies du client. C'était, comme diraient les plus jeunes, en quelque sorte son argent de poche quotidien.

      Cependant, et bien heureusement, il lui arrivait parfois d'aller à l'extérieur de l'établissement pour se promener dans le jardin de l'académie ou dans la forêt, du moins, avant que celle-ci ne se soit faite entièrement rasée par elle ne savait quelle raison. Cela avait beaucoup intrigué, et c'est toujours le cas à vrai dire. Comme quoi, même les discussions qu'elle écoutait à l'insu des autres ne suffisait pas à la renseigner sur tous les événements se déroulant à l'académie. Il en va de même pour le fait qu'elle n'ait jamais revu ni croisé au détour d'un couloir ni même entendu parler une seule fois du fameux jeune homme eux cheveux rouges vif, Kyra, et de son petit camarade de chambre, Hideki.

      Elle était bien bien naïve, notre Yuki. Du moins, c'est ce dont elle voulait elle-même se convaincre. Oui, elle savait très bien qu'elle ne les avait jamais aperçus par sa propre faute et son isolement si soudain. Elle-même n'avait pas compris les raisons de son attitude après seulement quelques jours passés ici. Le fait qu'elle partageait sa chambre avec d'autres filles de l'établissement n'y changeait rien ; elle ne leur avait jamais adressé la parole, si ce n'est par de quelques simples formules de politesse. C'était à peine si elle connaissait le prénom de chacune -et encore, si elle venait à devoir leur adresser la parole en première, elle les confondrait certainement.
Mais cela ne risquait pas d'arriver car, quand les filles restaient un peu trop longtemps dans la chambre au goût de Kiba, le kitsune blanc le faisait bien sentir à notre petite brunâtre, qui s'en allait aussitôt en quête d'un espace vert et tranquille. Une fois arrivée dans un endroit adéquate, elle laissait sortir le mâle. Puis Yõkai, la femelle.

      Ces moments étaient, au fur et à mesure du temps, devenus quotidiens. C'était désormais leur train de vie, leur petite routine, et personne ne pourrait changer cela. Ce n'était pas que Yuki est si attachée à cette vie qu'elle ne laissera rien ni personne s'interposer à cela. Même si, il était vrai qu'elle était devenue bien moins craintive et ses démons bien plus affectueux envers elle. Non, c'était plutôt que tous quatre -enfin, tous trois en oubliant Raven qui, lui, ne sort que très rarement et ne parle strictement jamais- avaient conclu un accord stipulant que, même si le pouls de la jeune fille s'accélérait, les kitsunes feraient tout leur possible pour ne pas prendre le dessus et ainsi éviter une transformation involontaire. En échange de cela, Yuki s'engageait alors à les laisser prendre le dessus quand la raison était réellement valable ainsi que maintenir leur routine toute l'année, qu'elle ait quelque chose de prévu ou non. Cela n'évitait bien évidemment pas les débordements, mais elle s'y ferait. Et puis, de toute façon, il n'y aurait pas de risque de se faire surprendre. Après tout, personne n'irait parler à une ermite, aussi mignonne et gentille soit-elle.

" - Eh, oh, Humaine.. Tu t'es encore perdue dans tes pensées..." lâcha lacement une voix rauque et masculine, comme sortie d'outre-tombe.

《 - Hein ? 》 fit la jeune fille, sursautant sur le coup et clignant ensuite bêtement des yeux d'un air enfantin.

" - T'es vraiment un cas, toi." soupira une seconde voix tout aussi rocailleuse que la précédente mais cette fois-ci féminine. "Allez, lève-toi de ce banc, c'la fait déjà dix minutes que nous sommes assis là à n'rien faire. Va te dégourdir les jambes, petite humaine." elle marqua une légère pause avant de reprendre sur un ton désespéré "Et puis arrête de cligner des yeux comme ça, on dirait un renardeau qui découvre le monde."

      Fronçant les sourcils, Yuki leur répondit d'un air un peu irrité :
《 - Je vous signale que c'est déjà la deuxième fois qu'on va dehors aujourd'hui, soyez contents de pouvoir sortir un peu plus souvent au lieu de vous plaindre. Surtout toi, Yõkai ! 》

" - Eh, ce n'est pas une enfant humaine comme toi qui va faire la loi ici.

- Elle a raison, nous prenons le dessus quand nous le voulons, humaine, ne l'oublie pas. Tu nous appartiens, Humaine." Kiba avait prit la parole un court instant d'une voix très froide avant que la femelle n'enchaîne :

"- En plus tu passes pour une folle à t'énerver contre Casper, ma pauvre fille. Il y a déjà d'autres humains qui t'ont regardée de travers, vois pas toi-même."

      À ces mots, la brune tourna légèrement  la tête et vit un petit nombre de personnes discuter entre elles tout en la regardant. Elle baissa quelque peu les yeux, rougissant de honte, puis fit volte face pour entamer une marche rapide dans la direction opposée aux individus. Tout en marchant, elle saisit un bout de son écharpe pour le remonter au niveau de sa bouche, la dissimulant ainsi de tout regard accusateur qui pourrait se déposer sur elle si elle venait encore à parler à ses démons. Car, oui, il n'y avait bien entendu qu'elle qui pouvait les entendre quand ils lui parlaient ainsi. Quand ils ne semblaient être que de petites voix dans la tête d'un fou.
Mais, à un détail près ; ils étaient réels et pouvaient même parler grâce à la bouche de Yuki s'ils le souhaitaient. Ou bien -comme fait à l'instant- par la pensée. Tout dépendait de leur envie.

      La jeune femme aux allures enfantines marcha donc quelques minutes dans l'allée du jardin, aussi silencieuse qu'à son habitude depuis bien trop longtemps maintenant. Elle arriva ensuite devant un arbre auquel elle s'adressa en regardant le ciel encore bleu et le soleil déjà lentement tombant de l'après-midi d'hiver, puis les quelques personnes qui passaient par là, se baladaient, discutaient. Elle sourit.

La voix du mâle raisonna un instant dans sa tête :
" - La compagnie de ta race te manque, n'est-ce pas, Humaine ?"

Elle répondit alors simplement de sa discrète voix fluette :
《 Oui. 》