Kénan Arget [Terminé]

Sa sœur lui manquait. Il lui avait menti en lui disant qu'il pouvait se débrouiller sans elle. Il voulait qu'elle aille là-bas, qu'elle soit en sécurité. Ça pouvait paraître étrange. Il avait dix ans, et c'était lui qui prenait certaines décision pour sa grande sœur. Elle n'avait jamais eu confiance en elle. Quand il fallait demander son chemin, c'était lui qui y allait toujours, parce qu'elle s'y refusait, trouvant toujours toutes sortes de prétextes. Elle avait peur. Cela se voyait comme le nez au milieu de la figure. Et lui ? Non. Vous direz que c'est parce qu'il était plus jeune, un peu inconscient. Laissez moi vous répondre : Il est peut-être impulsif, mais pas inconscient. Il savait que leurs parents avaient étés tués, bien qu'il n'en ai que de vagues souvenirs. Il savait qu'ils étaient traqués. Qu'il risquait sa vie à chaque instant. Mais il savait aussi qu'il avait les moyens de se défendre. Pas comme sa sœur de façon offensive, mais ces dernières semaines, sa blague débile lui avait servit plus d'une fois à s'échapper.

Il était sur le qui-vive. Il avait entendu des bruits. Il regarda par la fenêtre de la personne qui avait bien voulu le loger. Il se faisait discret. Ce sont eux. Il les vit parlementer avec la gentille dame sur le palier. Il était caché dans le grenier. Parce que la dame, et bah, elle avait aussi un pouvoir. Elle n'avait pas voulu lui dire lequel, mais elle avait vu le sien. Enfin vu, c'était un grand mot, puisqu'on ne peut voir l'air. Mais quand elle avait vu des gens tomber, elle avait compris. Elle l'avait tiré à l'écart, et pendant qu'il faisait l'innocent, elle avait proposé de le cacher. Pour qu'ils ne le trouvent pas. Les voix se firent plus fortes. Il commençais à avoir peur. Ils avaient des armes. Si ils avaient décidé de rentrer, ils rentreraient. Les voix se transformèrent en cris indignés, lorsque l'un des hommes, à bout de patience bouscula la dame pour passer. Ils s’engouffrèrent tous dans la maison et la dame les suivit en vociférant, et en leur ordonnant de sortir de chez elle immédiatement. Et puis, il entendis des bruits sourds, comme des bruits de lutte. Il se souvint alors des paroles de la dame : "Si jamais quelqu'un viens, cache-toi dans l'armoire ici, et ne fait surtout pas de bruit." Elle lui avait montré : il y avait un double-fond dans cette armoire. Elle l'avait regardé en souriant : "Cette armoire a servit à cacher des enfants juifs durant la guerre". Il ne connaissais pas vraiment cette époque, ne s’intéressant pas trop à l'histoire. Mais il avait compris : cette cachette, était la meilleure qu'on puisse trouver dans une maison. Il rassembla ses affaires en silence, pendant que le vacarme continuais en bas. Il avait presque tout gardé dans son sac, alors ce ne fut pas difficile. Il attrapa les couvertures qu'elle lui avait prêté, et les pliait sommairement avant de les poser doucement au sol. Ne pas laisser de traces. En bas, cela semblait s'être calmé. Il se glissa dans l'armoire avec son sac à dos et refermais comme elle lui avait montré.

La dame se mit de nouveau à crier. Pas de colère cette fois. De douleur. Il avait envie d'aller l'aider, mais que pouvait-il faire, lui, petit garçon de 10 ans face à 5 hommes armés jusqu'au dents. Il resta donc dans son armoire, en se bouchant les oreilles, des larmes d'impuissance coulant silencieusement sur ses joues. Au bout d'un moment, plus rien. Il se débouchais les oreilles, se demandant ce qu'ils se passait. Étaient-ils partis ? PAN ! Il faillit crier, mais se retint à temps, en plaquant ses mains sur sa bouche. Il n'entendait plus que sa respiration saccadée, et son cœur battait tellement fort qu'il avait l'impression qu'il allait sortir de sa poitrine. Il entendit des pas résonnant de partout. Ils avaient tuée la dame ! Ils le cherchaient ! Ils allaient le trouver ! Des pas lourds et réguliers se mirent à monter les marches menant au grenier. Il retint difficilement sa respiration. La porte de l'armoire s'ouvrit. Il pouvait entendre l'homme pester en fouillant parmi les vêtements. Heureusement, il n’eut pas l'idée de frapper le fond. Les bruits finirent par s'estomper, puis s'arrêter totalement. Il n'osait toujours pas bouger.

Il ne savait combien de temps il était resté camouflé ainsi, mais lorsqu'il sortit, il faisait presque nuit. Il n'y avait plus personne dans la maison. Plus personne vraiment ? Si, il restait le cadavre de la gentille dame. Ainsi qu'un mot. Un mot taché de sang, écrit de façon précipitée, les dernières paroles de la dame, les dernières paroles qu'elle avait voulu lui adresser :

"Kénan. Tu ne m'a jamais dis ton prénom, mais je l'ai vu écrit sur l'un de tes livres. Pour la peine, je te donne le mien : Claire. Je te l'ai dis, moi aussi j'ai un pouvoir. Parfois, j'arrive à deviner l'avenir. Et j'ai vu ces hommes arriver. C'est pour cela que je t'écris ce mot maintenant. Si tu le lis, c'est qu'il m'est arrivé quelque chose.
Petit Kénan, même si cela m'a coûté la vie, je suis heureuse de t'avoir connu. De t'avoir permis de vivre pour que tu puisse, un jour, retrouver ta sœur, dont tu m'a si longuement parlé. Car tu va la retrouver, je n'en doutes pas un seul instant. Les hommes sont partis, persuadés qu'ils avaient fait fausse route, mais heureux d'avoir "débarrassé le monde" de ma "dangereuse" personne. Jamais je n'aurais fait du mal à qui que ce soit. Regarde dans la table de repas, tu y trouveras quelque chose pour toi. Je l'ai caché pour ne pas qu'ils la trouvent. Petit Kénan, saisit la chance qui t'es donnée. Ne te retourne pas, et ne pleure surtout pas. Car ton sourire est une des plus belles choses qu'il m’a été données de voir dans ma vie. Adieux. Claire."

Il s'effondra en sanglots, traitant ces hommes de tous les noms. Pourquoi avoir tué une personne aussi gentille ? Pourquoi ? Presque à l'aveuglette, il tâtonna la table jusqu'à retrouver le mécanisme d'ouverture. Là se trouvais une belle lettre cachetée, avec écrit son prénom : Kénan. Il la prit et sortit en courant. Il se précipita vers le coin le plus isolé qu'il pu trouver et se mit à crier toute sa rage. Il finit par s'endormir contre le tronc d'un arbre, épuisé par toutes ces émotions. Il se réveilla quelques heures plus tard en grelottant, les idées un peu plus claires. Il se rendit compte à quel point il avait prit des risques et se maudis. Il était dans la forêt. Normalement, il serait plus difficile de le retrouver surtout qu'il faisait nuit. Il alluma sa petite lampe de poche en frissonnant. Il enfila son pull, puis décachetais la fameuse enveloppe. L'académie Tsuki... Claire avait raison ! Il allait retrouver sa sœur ! Et enfin, être lui aussi en sécurité. Il se mit directement en route vers l'Angleterre. Sur le trajet, il s'efforçait de ne pas penser à Claire, et gardait ses pensées tournées vers Gwen'. Était-elle au courant de son arrivée prochaine ? Comment allait-elle réagir ? Il avait tellement hâte de la revoir. De tout lui raconter. Il coupait parfois à travers les champs et les jardins pour aller plus vite. Enfin, il vit un immense manoir, entouré par de hautes grilles. L'académie. Enfin.